
* VAMPIRE SOUS LES SUNLIGHTS présente *
TEETH MOVIE !
– GÉNÉRATION PERDUE –
Chronique du film GÉNÉRATION PERDUE (THE LOST BOYS)
Rubrique VAMPIRE SOUS LES SUNLIGHTS
Date de sortie du film : 1987
Durée : 93 minutes
Genre : Fantastique, horreur, kid movies.

Cet article est inscrit dans le cycle dédié aux films de vampires que nous appelons VAMPIRE SOUS LES SUNLIGHTS. Soit un sous-genre à part entière du cinéma fantastique et horrifique qui contient en son sein un panel assez conséquent de films importants.
Nous reviendrons de temps en temps vous présenter d’autres films de la rubrique. Mais chaque chose en son temps. Aujourd’hui, nous faisons le voyage en 1987 afin de remettre, sous le feu des projecteurs, un autre film culte, doublé d’un kid movie typique des 80′ !
Parce qu’elle fait partie intégrante du film, vous pouvez aussi écouter la BO en lisant l’article…
Le pitch : Après le divorce de leurs parents, Michael et Sam, deux frères (le premier est un jeune gars de 18 ans environ, le second un ado de 13 ou 14 ans), emménagent avec leur mère dans la ferme de leur grand-père, en Californie, dans la petite station balnéaire de Santa-Carla, que ses habitants surnomment “la capitale du crime des États-Unis” ! Car la région souffre d’une vaste série de kidnappings, aucune des victimes n’ayant jamais été retrouvée.
C’est en fréquentant les fêtes foraines de ces nuits d’été que Michael rencontre Starr, une jeune femme de son âge, dont il tombe amoureux au premier regard. Mais celle-ci fréquente la bande de motards que tout le monde redoute et qui met à sac les lieux touristiques.
C’est au moment où Michael se laisse entrainer par ces délinquants que Sam fait la connaissance des frères Frog, deux ados de son âge. Ces derniers lui assurent alors que son frère est en train de devenir un vampire, et qu’il faut l’éliminer…
Bande annonce vintage…
1987 : c’est aujourd’hui l’écho de toute une époque pour les geeks cinéphiles. En ce temps-là, les films d’horreur avaient la côte, les ados adoraient frissonner ensemble lors de quelques soirées vidéos (on appelait ça des soirées VHS, et c’était bourré de films d’horreur), et Joël Schumacher, réalisateur jusque-là quasiment inconnu (on l’avait quand même remarqué sur LA FEMME QUI RÉTRÉCIT, en 1981, une parodie du célèbre film de Jack Arnold de 1957), faisait sensation avec un film d’horreur new-âge !
Je me souviens de la réputation sulfureuse que GÉNÉRATION PERDUE trimbalait alors que j’étais ado : Le film était quasiment considéré comme une sorte de remake de L’ÉQUIPÉE SAUVAGE, le mythique film de motards réalisé par László Benedek en 1953 (celui où Marlon Brando a mis le monde à genoux dans son costume tout-cuir, et cristallisé l’esprit du rock’n roll en même temps qu’Elvis Presley), le tout mixé à la sauce vampire, au cœur des années 80, la plus grande décennie de films d’horreurs de l’histoire du cinéma (oui, bon, d’accord, après celle des années 30…) !

Quelle est donc cette “génération perdue” ?
Pour revenir à mes souvenirs de l’époque, GÉNÉRATION PERDUE sonnait vraiment comme un film punk, un trip interdit aux moins de dix-huit ans qui te foutait la frousse sans que tu n’aies besoin de le voir ! Regarder le film aujourd’hui est, dans ce contexte nostalgique, un pur paradoxe, car c’est autant un navet ridicule, qu’un pur, un total et jouissif plaisir régressif !
Je l’ai revu à travers les yeux de mon fils, 13 ans (dans une franche et virile optique de déniaisement, visant à le propulser dans la cinéphilie horrifique), et j’ai pu constater le pouvoir divertissant de cet ovni pour un gamin de cet âge : Beaucoup d’humour, mais un parfum de l’interdit à l’eau de rose, un feelgood movie pour ado, teinté d’une fausse aura de révolte.

Heureusement qu’on peut compter sur eux pour sauver le monde !
Sur le chemin de la rébellion, on entend tout de même la bande-son nous balancer une reprise des Doors, PEOPLE ARE STRANGE (la production n’avait apparemment pas les droits d’y mettre la vraie chanson, à l’époque !). Le film joue, dans sa première partie en tout cas, l’urgence du rock, du “vivre vite” (et éternellement jeune), bravant les interdits. Les jeunes délinquants sont des goules au look de stars du rock qui se dopent à mort (au sang, bien sûr…) et qui vivent dans une caverne au décorum destroy, dont la paroi la plus exposée exhibe un gigantesque poster de… Jim Morrison, évidemment ! Michael, le héros principal de cette histoire, est interprété par Jason Patrick, un clone de Jim Morrison. Acteur trop rare, il jouera dans l’excellent RUSH quatre ans plus tard, mais laissera le rôle-titre du biopic sur le “Roi lézard” à Val Kilmer. Face à lui, David, incarné par le jeune Kiefer Sutherland, futur leader de la série TV « 24 » et ici chef du gang des vampires, lui chipe la vedette à coup de charisme incandescent. Et pourtant Jason Patrick joue vraiment très bien !
Mais face à eux, il y a deux autres stars…
Le film réunit un duo d’ados, à la fois têtes à claque mais incontestablement brillants, interprétés par les deux “Corey”, j’ai nommé Corey Haim et Corey Feldman. Si l’on avait déjà apprécié Corey Haim dans le mésestimé PEUR BLEUE, d’après Stephen King, Corey Feldman nous avait forcément marqué dans STAND BY ME et LES GOONIES. Soit deux représentants majeurs de l’entertainment de l’époque au rayon des films pour pré-ado (les kid movies), qui formeront d’ailleurs, par la suite, un duo à succès sur plusieurs films, le temps de quelques années.
La scène d’intro du film.
Voilà qui fait trop assaut de charisme pour un film au scénario aussi faible. Et, dans la seconde partie, le réalisateur va se laisser aller, et l’ado (le teen movie) va prendre le dessus sur la canine (le teeth movie) !
Si la première partie du film semble promettre une ÉQUIPÉE SAUVAGE (et pourquoi pas une HORDE SAUVAGE ?) au pays des vampires, la seconde inverse complètement le paradigme en proposant une sorte de “Goonies contre Dracula” (façon LES CHARLOTS CONTRE DRACULA, pour ceux qui connaissent LE film culte…). À l’époque, à priori, tout le monde n’y a vu que du feu. Mais aujourd’hui, ça se voit comme les dents de Nosferatu au milieu de la figure !
Franchement, le pitch de départ était génial : Les vampires comme métaphore ? Ce n’était pas nouveau, d’accord, mais cette fois la métaphore en question visait la jeunesse rock, voire punk, symbolisait le refus de vieillir et le projet de vivre une vie décomplexée au bord de la plage tout au long d’un été sans fin, à travers une recherche du plaisir sans limites. La possibilité de vivre éternellement une vie hédoniste, épicurienne, rock’n roll, de faire la fête continuellement, avec tous les excès que cela implique, sans devoir en payer le prix à long terme. Rebel without a cause !!!

Les vampires… ces rebelles !
Les scénaristes semblaient s’être aussi posé la question qu’il fallait, à priori : L’adolescence étant la grande période de l’existence liée aux changements, aux questionnements, aux obligations de trouver sa voie, le vampirisme, là aussi, amène les solutions qui tuent : Ne jamais changer, ne jamais vieillir, ne jamais grandir, ne jamais se soucier du lendemain. Rester éternellement comme on est, sans devoir se plier à une quelconque contrainte.
On sait désormais que le projet de départ était de réaliser une version vampirique de PETER PAN. On ne peut qu’y abonder !
Partant de là, pourquoi le trio d’ados qui s’oppose aux vampires par des formules issues des comics old-school (et qui vont y arriver à coups d’eau bénite et de pieux dans le cœur, annihilant de fait toute la révolution promise…) veulent détruire la solution à tous leurs problèmes ? Ils auraient pu au moins avoir l’élégance de nous l’expliquer !
Joel Shumasher était fan d’Ann Rice, et l’on sent que le début du film lorgne du côté de l’œuvre de l’écrivaine. À revoir le film aujourd’hui, on remarque que les scènes d’horreur sont extrêmement rares, fugaces, quasiment hors-champ. Un peu l’équivalent d’un film comme EMMANUELLE, réalisé en 1974, qui promettait du sexe et de la révolution mais qui en donnait finalement très peu. De fait, GÉNÉRATION PERDUE ne montre quasiment pas de sang, pas de sexe (là aussi, la scène d’amour entre Michael et Starr est filmée hors-champ). Et très vite, le film tombe dans le teen-movie, comme l’avait déjà fait VAMPIRE VOUS AVEZ DIT VAMPIRE avant lui. À revoir aujourd’hui, c’est très aseptisé !

Des jeunes héros qui trouvent un moyen de lutter contre les vampires… dans les comics et les films de Rambo !
Le film est produit par Richard Donner, brillant réalisateur des GOONIES mais aussi des deux premiers SUPERMAN avec Christopher Reeves, de DAMIEN LA MALÉDICTION et de la saga L’ARME FATALE. Il devait au départ réaliser le film, mais le planning ne le lui a pas permis. Joel Shumasher était de la génération des “clippers d’Hollywood”, tous ces metteurs en scène superstars d’un moment, venus du monde du clip, (pas du “slip”, lisez un peu mieux, bordel !) comme Adrian Lyne (7 SEMAINES ½ ), Mary Lambert (SIMETIERRE) ou Russel Mulcahy (HIGHLANDER) et une exception sur la durée avec David Fincher. Sauf que Joel Shumasher n’a jamais tourné de clip ! Il se calait juste sur le style de ses collègues. Il fera sensation avec son film suivant, L’EXPÉRIENCE INTERDITE, toujours avec Kiefer Sutherland, puis ses artifices s’effondreront lamentablement en tentant de poursuivre la franchise BATMAN après les deux films de Tim Burton.
Aujourd’hui, que reste-t-il de GÉNÉRATION PERDUE ? Il en reste un film relativement kitsch et sympathique, à voir sans conteste pour son charme suranné. Il établit un lien incontestable entre un père de famille qui l’a vu à l’époque où il avait l’âge de ses héros, et un adolescent qui a aujourd’hui le même âge !

Le jeune Kiefer crève l’écran ! (et marque les esprits)
Inutile de le conseiller à un autre public. Le film est désormais presque un navet (deux suites ont été tournées et c’est bien pire). Et il ne fait plus peur à personne, tout comme son très proche modèle VAMPIRE VOUS AVEZ DIT VAMPIRE (auxquels les producteurs désiraient qu’il se réfère (il fera l’objet d’un prochain VAMPIRE SOUS LES SUNLIGHTS et on verra pourquoi il est quand même bien meilleur)). Nous sommes ici très loin de AUX FRONTIÈRES DE L’AUBE (NEAR DARK) tourné la même année par Kathryn Bigelow, chef d’œuvre crépusculaire nettement plus pérenne.
Dans le langage de tous les jours, en ce qui concerne GÉNÉRATION PERDUE, on pourrait désormais entendre le mot “kitsch”. Dans le jargon des geeks, on appelle ça, au pire du plaisir régressif, au mieux de la nostalgie…
La chanson est atroce. Mais le clip est sympa.
That’s all, folks ! !!!
