20 000 LIEUES SOUS LES MERS
Chronique du film 20.000 LIEUES SOUS LES MERS
Réalisateur : Richard Fleischer
Date de sortie : 1954
Genre : Aventure
Niveau d’appréciation :
Attention ! Aujourd’hui article historique ! On ne va pas parler de n’importe quel film. On va parler de mon film préféré de tous les temps. On va parler de 20.000 LIEUES SOUS LES MERS de Richard Fleischer (réalisateur de SOLEIL VERT, LE VOYAGE FANTASTIQUE, LES VIKINGS, etc.)
Ce film date de 1954. Non, attendez ! Ce n’est pas la bonne façon de débuter cet article.
Ce film n’a pas d’âge et si vous ne l’avez pas vu, vous ne connaissez rien au cinéma !
Non, c’est un peu violent et prétentieux. Hum…commençons simplement. Il était une fois…
Il était une fois un petit garçon qui aimait bien regarder la télé (comme tous les petits garçons en fait.) Il aimait regarder des cartoons avec Bugs Bunny, Titi et Grosminet et tous les LOONEY TUNES, ainsi que les dessins-animés Disney. Ses parents l’emmenaient voir les nouveaux films d’animation au cinéma, ou lui achetait (à lui et à son frère) des VHS des Disney sortis il y a des années de cela. Il aimait aussi regarder le Club Dorothée mais il était un peu petit pour ça et sa maman le surveillait pour qu’il ne regarde pas les japonaiseries violentes que son frère regardait. Ce petit garçon n’avait même pas 8 ans (ou à peine, dans ces eaux-là…maintenant il est vieux alors il a oublié la date précise…) quand sa maman acheta la VHS de 20.000 LIEUES SOUS LES MERS (un film Disney, avec de vrais acteurs en chair et en os.) Et c’était le premier film que ce petit garçon allait découvrir.
Bon, ça c’est la version romancée. Dans les faits exacts, je ne suis plus très sûr d’avoir vu ce film avant ou après MARY POPPINS ou PETER ET ELLIOT LE DRAGON. Mais d’une part ces 2 films sont un mélange de film live et de dessin-animé, et d’autre part je m’ennuyais sévère devant MARY POPPINS (Eh ! A 8 ans, les bonnes fées et les chansons sur l’éducation, ce n’était pas super palpitant, ok ?)
20.000 LIEUES SOUS LES MERS était mon premier film « adulte » qui ne s’adressait pas franchement aux gosses de mon âge. Et là, un truc incroyable s’est produit. J’ai aimé direct. J’ai adoré le film même. Alors qu’avec le recul, je me dis qu’il n’y a guère d’action, peu d’humour, et que l’œuvre de Jules Verne n’est pas très child-friendly. Et pourtant…je fus transporté.
Même le trailer se sent obligé de parler de tout
Déjà ce film défie le temps ! J’ignorais à l’époque en quelle année il avait été réalisé. Je n’y connaissais rien. Et même si l’image devait faire un peu vieillotte, on était dans l’ère des VHS donc tout film était un peu moche et flou. Je suis tombé des nues des années plus tard quand j’ai appris qu’il datait de 1954. Jamais je n’aurais cru ça. Surtout que le film est en technicolor, et que c’était plutôt rare dans les années 50.
Adapté du célèbre roman de Jules Verne, 20.000 LIEUES SOUS LES MERS nous plonge en l’an 1866. Des rumeurs concernant un monstre marin circulent un peu partout dans le monde. Des navires sont coulés sur toutes les mers du globe. Une grande chasse est organisée sur un navire de guerre censé tuer le monstre. A bord, nos personnages principaux : le professeur Aronnax (joué par Paul Lukas) du muséum d’histoire naturelle de Paris et son domestique Conseil (un Peter Lorre vieillissant) ainsi que Ned Land (Kirk Douglas), un harponneur recruté pour aider à vaincre le monstre. Tous 3 vont passer par-dessus bord suite à l’attaque du monstre, et ils vont découvrir que le monstre n’est autre qu’un submersible en tôle armée. Les naufragés vont être fait prisonniers et se retrouver à bord de l’appareil appelé Nautilus. Ils vont faire la connaissance du capitaine Nemo (James Mason) qui n’a pas l’intention de les libérer puisqu’ils connaissent son secret.
La magnifique affiche de l’époque. Elle ne vous vend pas du rêve ?
Ned Land est l’électron libre du groupe, celui qui défie sans-arrêt Nemo et ne pense qu’à s’échapper. Il va se lier d’amitié avec Conseil, tandis que le professeur Aronnax va être curieux et fasciné par leur hôte, Nemo, un être complexe et torturé qui a une revanche à prendre sur une société qu’il méprise et qui a abandonné son identité (Nemo signifie d’ailleurs « personne » en latin). Il se sert du Nautilus comme arme pour couler des navires de guerre.
Nemo va accepter de révéler certains secrets au professeur, lui faire découvrir le fonctionnement de son sous-marin, lui expliquer comment sa femme et son enfant ont été torturé à mort, en espérant peut être convaincre Aronnax qu’il est un vengeur et qu’il est dans son bon droit.
Au final, tout cela se terminera tragiquement après moults aventures, explorations des fonds marins ou rencontres avec un calmar géant.
Le film fait certes l’impasse sur certains passages du livre de Jules Verne (comme souvent, pour éviter le film de 4h.) mais le rythme est excellent. Le réalisateur a choisi d’accorder plus de temps aux personnages en évitant certaines escales du sous-marin et c’était surement le sacrifice le plus judicieux. Demeurent malgré tout d’incroyables séquences sous-marines pour l’époque, une escale sur une île pleine de cannibales, un combat contre un calmar géant, des batailles contre des navires, et le cœur du livre, à savoir la complexité du personnage de Nemo, est intacte.
D’incroyables scènes sous-marines
Déjà petit, j’aimais beaucoup Nemo (joué par un James Mason très convainquant) même si c’était un assassin. La fin me faisait toujours mal au cœur avec la disparition de cet incroyable sous-marin et son maitre maudit. Toutes les scènes clés sont là : Nemo qui montre des esclavagistes au professeur Aronnax pour lui montrer contre qui il se bat, les tourments muets de Nemo lorsqu’il joue de son orgue avec une rare intensité, les tentatives d’évasion de Ned Land qui déclenchent sa rivalité avec Nemo, l’ambiguïté de la relation entre Aronnax et Nemo, déchirée entre respect mutuel et désaccords moraux. Et que dire de ce souffle d’aventure incroyable dans ce film ?
Je me souviens petit avoir fabriqué moi-même un Nautilus en Lego et m’être amusé à prétendre qu’il attaquait mon bateau pirate Playmobil. J’ai dû commencer à aimer les aventures en mer avec ce film. Les vieux bateaux, les sous-marins, les monstres géants, etc. Les scaphandres avec lesquels Nemo et son équipage partent chasser dans les profondeurs sont également très réussis. Les effets spéciaux sont encore incroyables aujourd’hui. Le Nautilus est magnifique et son design très inspiré (la maquette faisait 61m et respecte l’aspect donné par Jules Verne d’un monstre avec ses éclairages ressemblant à des yeux dans l’eau sombre.)
Les décors luxueux de l’intérieur du sous-marin sont splendides. Les détails de la machinerie rétro-futuriste qui anime le Nautilus ne font jamais cheap. On rêverait de pouvoir visiter ces décors au look steampunk. Ce n’est pas pour rien si le film a remporté les Oscars des meilleurs effets spéciaux et des meilleurs décors à l’époque. Si les scène sous-marines sont aussi réussies, c’est également parce qu’un énorme réservoir a été construit et magnifiquement décoré comme les fonds marins. En un sens elles sont d’authentiques scènes sous-marines et n’ont pas pris une ride. Je me demande même encore comment on été réalisé certains plans d’attaque de requin lors de la scène de récolte de nourriture sous-marine. C’est un mélange de prises de vue réelles d’un véritable requin qui nage et sans-doute d’une réplique en caoutchouc lorsqu’il est présent dans le même plan que les acteurs, mais là encore on y croit, les trucages sont convaincants.
D’incroyables décors intérieurs à l’allure Steampunk
Même le calmar géant en caoutchouc tient la route. Le réalisateur a eu l’idée brillante de filmer l’affrontement durant une tempête afin de masquer quelques trucages de tentacules et donner l’illusion que la créature bouge sans arrêt (en réalité secouée par le vent.) Il existe d’ailleurs une scène coupée d’un premier jet abandonné où l’équipage était censé affronter le calmar sur une mer calme lors d’un coucher de soleil (ça doit se dérouler comme ça dans le bouquin je crois…) Mais évidemment la créature ne faisait pas illusion. Il bougeait quelque peu mais il était assez évident qu’il s’agissait d’une créature mécanique limitée. L’idée de la tempête rend la séquence beaucoup plus dynamique et masque très bien les limitations techniques.
Le calmar est un amalgame de caoutchouc, de ressorts, de tubes flexibles, de tissu de verre et de plastique. Il nécessitait 28 personnes pour l’animer et contrôler les vérins hydrauliques. C’est Robert A.Mattey qui l’a conçu, un spécialiste des effets spéciaux qui construira plus tard le requin de JAWS (LES DENTS DE LA MER.)
Le calmar géant : une impressionnante créature pour l’époque
Et que dire des acteurs ? Si Paul Lukas en professeur Aronnax est peut-être un peu plus effacé que les autres (mais cela vient aussi de sa personnalité dans l’histoire), James Mason fait un capitaine Nemo élégant mais taciturne, mystérieux et impitoyable. Civilisé mais également cruel. Ses souffrances sont palpables et la prestation de l’acteur très convaincante. Un des meilleurs rôles de James Mason.
Kirk Douglas est égal à lui-même, il joue très bien le marin un peu rustre, bon-vivant et sympathique mais assez borné et tête brulée.
Peter Lorre joue un Conseil sage et posé, un peu timide mais attachant.
Que dire de plus si ce n’est que ce film a lancé mon intérêt pour le cinéma d’aventure ? Bien sûr certains regretteront des passages supprimés par rapport au livre, mais le film en tant que tel est un modèle du genre. Cette image du Nautilus qui fend les flots avec ses lumières en forme d’yeux est restée gravée dans ma mémoire.
Le Nautilus attaque
Bref, vous vous dîtes surement que c’est la nostalgie qui parle. Mais je vous assure que si vous jetez un œil à des extraits, vous pourrez constater par vous-mêmes à quel point le film résiste au temps. Tout est crédible, à aucun moment les effets spéciaux datés ne vous sortent du film. Le budget à l’époque était de 4,8 millions. Par rapport à aujourd’hui, sans l’inflation, cela parait risible. Mais c’était le premier film à gros budget de Disney à l’époque.
Je n’ai pas peur de le dire, pour moi ce film est un chef d’œuvre. Peut-être qu’il existe des adaptations du livre plus complètes, qui reprennent plus de scènes du livre, mais en ce qui concerne les acteurs, la magnifique musique de Paul J.Smith, les effets spéciaux, la direction artistique, ce film tient la dragée haute à ces autres adaptations. Tout est formidablement maitrisé, tout est crédible. La fin me fait toujours un peu mal au cœur. On ne veut pas voir disparaitre Nemo et son incroyable sous-marin. Malgré ses actes, on finit par le voir comme une version hardcore de Robin des bois, ou comme un Punisher maudit, au-delà de toute rédemption, mais torturé et dont la quête est compréhensible, faute d’être défendable. Le rythme du film est également excellent. On ne s’ennuie jamais. On alterne scènes contemplatives des fonds marins avec séquences d’action, avaries du Nautilus, développements de personnages, petites touches d’humour avec la relation entre Ned et Conseil, etc.
L’arrivée dans l’extraordinaire base secrète de Nemo, sur un thème musical lancinant mémorable.
Je ne compte plus le nombre de fois que j’ai vu ce film. Et je l’aime toujours autant, si ce n’est plus à chaque visionnage. Il est toujours difficile de choisir un film préféré, même un top 10. Cela dépend toujours de notre état d’esprit, la liste de nos films préférés peut varier. Mais si je devais vraiment choisir mon film préféré, rien que pour son importance dans mon développement personnel, ce serait sans aucun doute celui-là.
Il est évident que je recommande ce film à toutes et tous. Même à celles et ceux qui ne sont pas très attiré(e)s par les vieux films. Parce que ce film ne fait pas son âge. C’est un classique intemporel et une aventure comme on n’en fait plus. Vive Jules Verne, vive Richard Fleischer, vive ce film !
J’en ai même fait une affiche hommage
Merci de partager ton expérience !
J’ai découvert le film de manière parcellaire : une VHS « Les méchants chez Disney », qui se concentrait sur l’affrontement contre le Calmar géant, ce qui m’a donné une impression tronquée du film.
Je n’ai qu’un vague souvenir de mon premier visionnage intégral, qui m’a moins marqué. Seulement quelques bribes : la scène où le trio est laissé sur le sommet du submersible et survit à peine (et le regard de défiance du perso de Kirk Douglas), mon identification avec le pauvre Conseil, souvent tiraillé de tous les côtés. Peut-être que l’image du Ned Land de Kirk Douglas, héros très (trop ?) conventionnel a-t-il masqué les éléments plus profonds de Némo et de sa relation avec le scientifique de l’expédition ?
A revoir à l’occasion !
Ned est un peu idiot, c’est pas tellement le héros, effectivement moi je m’identifiais à Conseil aussi. Ned est trop défiant, il fout le bazar. Même s’il a un bon fond.
C’est difficile pour moi d’imaginer ne pas être marqué par un film qui est aussi beau visuellement quand même. Surtout pour l’époque. mais chacun son parcours.