LE MAGICIEN D’OZ, en 3 films
Chronique de 3 films adaptés de l’univers du magicien d’Oz de L. Frank Baum.
Date de sortie des films : 1939, 1985 et 2013.
Genre : Fantasy, comédie musicale
Aujourd’hui je vais vous parler de 3 films adaptés de l’univers de l’écrivain L. Frank Baum : LE MAGICIEN D’OZ.
Nous commencerons par le classique de Victor Fleming THE WIZARD OF OZ datant de 1939 (sorti en 1946 en France) et nous couvrirons une période de presque 80 ans en allant jusqu’au film de Sam Raimi OZ, THE GREAT AND POWERFUL de 2013, tout en passant par RETURN TO OZ de Walter Murch datant de 1985.
Les livres ayant inspirés les films
Je tiens à préciser que je n’ai pas lu les romans de L. Frank Baum à part le premier magicien d’Oz. Le bonhomme en a écrit des palettes et je ne m’y suis jamais intéressé, incertain que j’étais à trouver ce genre d’univers intéressant sous forme littéraire. Je ne pourrais donc guère juger de la fidélité des films, mais de toutes façons, je ne pense pas que le postulat de ces films soit d’être très fidèles. A part celui de 1939. RETURN TO OZ est à ma connaissance une adaptation libre de deux romans LE MERVEILLEUX PAYS D’OZ (1904) et OZMA, LA PRINCESSE D’OZ (1907), et OZ, THE GREAT AND POWERFUL ne serait pas tiré d’un livre à ma connaissance. Quant au premier livre…eh ben…je le connais…mais ça doit faire 25 ans qu’on me l’a lu (même pas sûr de l’avoir lu moi-même.) Alors je vais surtout parler des qualités des films en tant que films.
Un grand classique familial
THE WIZARD OF OZ (le magicien d’Oz) de Victor Fleming – 1939
Je vais faire comme si vous ne connaissiez pas l’histoire : une jeune fille de ferme, Dorothy, rêve de voir le monde et de fuir la vilaine voisine qui menace de tuer son chien. Elle commence à faire une fugue mais culpabilise et revient à la maison. Seulement, sur le chemin du retour, elle se fait emporter par une tornade qui l’emmène, elle et son chien Toto, dans un monde magique : le pays d’Oz. Là-bas elle y rencontre d’abord Glinda, la gentille sorcière du Nord puis la méchante sorcière de l’Ouest qui menace de lui faire du mal (il faut dire que la maison de Dorothy a atterri sur la tête de la méchante sorcière de l’Est, sa sœur.) Toujours est-il que Dorothy doit trouver le mystérieux magicien d’Oz pour apprendre comment elle peut rentrer chez elle au Kansas. Sur son chemin, elle va rencontrer les célèbres personnages que sont l’épouvantail, le lion peureux, l’homme de fer blanc qui ont chacun quelque chose qui leur manque : un cerveau pour l’épouvantail, un cœur pour l’homme de fer, du courage pour le lion. Et ils vont tous se joindre à Dorothy pour aller demander de l’aide au magicien d’Oz.
Un film qui vieillit très bien
D’une certaine façon, ce conte peut se rapprocher d’un ALICE AU PAYS DES MERVEILLES, mais en moins fou. C’est une quête dans un monde inconnu qui faisait rêver l’héroïne mais qui ne dure qu’un temps avant qu’elle s’aperçoive qu’elle aimerait bien rentrer chez elle. Une rêveuse qui rencontre des amis qui ont chacun quelque chose à apprendre, et, si vous connaissez l’histoire, un magicien qui ne peut rien résoudre car il est un imposteur. Mais le cheminement pour parvenir jusqu’à lui va permettre à chacun d’en apprendre plus sur eux-mêmes et vaincre leurs problèmes. Et évidemment, le doute est entretenu sur ce qui est réel ou imaginaire, et les amis/connaissances de Dorothy dans le monde réel semblent tous exister dans le pays d’Oz.
Ce film est une comédie musicale avec de nombreuses chansons, des décors magnifiques et une musique inoubliable. Il est encore très impressionnant aujourd’hui. On se demande même comment certains effets spéciaux ont été réalisé en 1939. C’est simple : on ne voit quasiment pas qu’il y a des effets. On n’y pense pas. Les décors sont des peintures : oui, mais nous sommes dans un monde féérique proche d’un dessin-animé. Cela fait partie de l’univers. Pareil pour les costumes (évidemment le lion est en homme en costume…) Mais les maquillages sont remarquables (mention spéciale à l’épouvantail dont le visage humain ne détonne pas avec le reste des plis du costume), et on est pris dans la féérie et l’humour du métrage.
Des maquillages et décors aussi factices que convaincants pour l’atmosphère féérique du film
Le film a plutôt bien vieilli et ne souffre pas trop de son âge, même si on devine qu’il sort d’une autre ère (pour son esthétique très « Disney » des années 50, et les coiffures et costumes typiques de l’époque.) La naïveté de l’univers enfantin et poétique s’accorde avec les effets en carton pâte (du carton pâte haut de gamme s’il vous plait, joliment peint.) Le résultat est assez impressionnant et ravira les amateurs de jolis films familiaux. On pourra toujours questionner le message du livre qui ne semble pas trop nous inviter à suivre nos rêves de l’inconnu, comme si c’était toujours la joie dans nos foyers, mais d’une part ce n’est pas à l’adaptation filmique de changer ce propos, et d’autre part on peut l’interpréter de diverses manières. Au lieu d’y voir une invitation à rester chez soi, on peut y voir plutôt un encouragement à trouver le bonheur en soi plutôt que dans des rêves impossibles, et prendre conscience de ce qu’on a déjà.
RETURN TO OZ (Oz, le monde extraordinaire) de Walter Murch – 1985
Un film que Tim Burton n’aurait pas renié
Ici nous avons un film également très intéressant. Il n’a pas bien marché au box-office à l’époque et beaucoup de critiques l’ont trouvé trop effrayant, trop sombre. Surtout pour un Disney (qui à l’époque était dans une phase plus sombre avec des films comme LE DRAGON DU LAC DE FEU ou TARAM ET LE CHAUDRON MAGIQUE.)
Seulement voilà : ces films ne sont pas mauvais du tout. C’est juste qu’ils peuvent choquer les enfants et sont inhabituels pour du Disney. Dommage, parce que les contes pour enfants ont toujours été un peu sombres, même les versions édulcorées depuis longtemps que nous connaissons (les originaux étaient sacrément gores parfois) : le petit poucet ? Des parents qui partent abandonner leurs enfants dans les bois. Le chaperon rouge ? Si on oublie qu’un bucheron (ou chasseur) sort tout le monde du ventre du loup à la fin, tout le monde se fait quand même bouffer ! (et ce bon bucheron n’existe pas dans le conte d’origine de la tradition orale.) Le garçon qui criait au loup ? Bah il se fait manger par le loup. Sans parler des sorcières et ogres qui bouffent des enfants dans tous les sens. La raison à cela c’est que ces histoires ont été racontées aux enfants pour leur apprendre des valeurs et des leçons (et à une époque où le concept de l’enfant roi qu’il ne faut surtout pas brusquer n’existait pas.) Si tout finissait bien malgré tout, le message serait moins clair.
Un film à redécouvrir avec un œil neuf
Mais en gros, RETURN TO OZ n’a pas été un grand succès parce que le public ne s’attendait pas à ça. Le film ne fait aucune concession. C’est sombre et inquiétant. Pourquoi ? Euh…oui, parlons de l’histoire.
Alors il faut déjà savoir que c’est une sorte de suite de la première histoire, mais non-officielle. Dorothy est jouée par une toute jeune Fairuza Balk (qu’on verra plus tard en raciste flippante dans AMERICAN HISTORY X ou en sorcière dans THE CRAFT.) Et donc oui, elle est censée être plus grande que la Dorothy de l’original mais ce n’est pas vraiment le cas (en 1939 on ne donnait pas le premier rôle à un enfant de 11 ans. Alors qu’avec ce RETURN TO OZ, c’est ce qu’ils ont fait.)
Dorothy continue de faire des rêves et de parler du monde d’Oz mais ses tuteurs ne la croient pas. Alors ils vont la mettre dans un hôpital psychiatrique (ah, ça commence bien.) Le traitement hyper progressiste de l’époque ? Des électrochocs (ah…euh…ok.) Mais Dorothy va s’échapper de là une nuit avec l’aide de la princesse Ozma et débarquer dans le pays d’Oz. La transition reste toujours mystérieuse et on ne sait pas si elle rêve ou si c’est réel. Ce qui est sûr, c’est que le monde d’Oz qu’elle va retrouver est une vraie ruine cauchemardesque. Le roi des gnomes s’est en effet emparé du royaume, a détruit des villes, transformé le lion, l’homme de fer et autres personnages connus en statues de pierre, et le tout ressemble à une vision cauchemardesque d’un film de Tim Burton.
Une étrange équipe de héros dans un royaume en ruines
Poursuivie par les sbires du roi des gnomes (dont la sorcière Mombi qui vole des têtes pour les garder dans des vitrines et en changer selon son humeur…), Dorothy va devoir trouver des alliés (une poule, un automate soldat, un épouvantail à la tête de citrouille, une…tête de cerf ???) pour mettre un terme au règne tyrannique de ce roi des gnomes qu’on ne verra qu’à la fin.
Ce film était trop en avance sur son temps pour son propre bien. Il ressemble davantage à un conte d’Halloween avec ses créatures de foire inquiétantes et rafistolées, son méchant animé en stop motion qui n’est qu’un amas de pierre et ses décors sombres et en ruines. Mais c’est un vrai plaisir à visionner en tant qu’adulte car il se dégage vraiment une atmosphère de conte d’horreur.
Comme indiqué plus haut, ce film s’inspire de deux livres. La sorcière Mombi du film est en réalité une combinaison de deux personnages des livres, la princesse Langwidere (tirée de OZMA, LA PRINCESSE D’OZ) qui change de têtes, et la version de Mombi (tirée du livre LE MERVEILLEUX PAYS D’OZ) qui est bien une mauvaise sorcière mais à l’allure plus classique de la vieille femme au nez crochu. Cela dit, la plupart des personnages étranges du film de Murch existent bien dans le livre OZMA, LA PRINCESSE D’OZ, qui est le livre dont le film tire le plus d’éléments. Les inquiétants wheelers sont présents, la princesse qui change de têtes et le roi des gnomes (moins flippant cela dit, c’est juste un vieux monsieur.)
Des méchants assez flippants
Les effets visuels du film sont également réjouissants. Un peu vieillots certes, mais comme je les aime : des animatroniques et de l’animation image par image (incroyable boulot pour le roi des gnomes qui est donc une créature d’argile animée en stop motion ou « claymation » comme le seront plus tard les WALLACE & GROMIT.)
Peut-être un film à ne pas mettre devant les yeux des plus jeunes enfants impressionnables, mais un film franc qui a une vision bien à lui de ce qu’il veut faire avec ce monde d’Oz, et sans sacrifier quoi que ce soit au cahier des charges du film pour enfants. D’où son relatif échec d’ailleurs. Le film abandonne l’approche de la comédie musicale pour un faire davantage un film d’aventures dans un monde inquiétant, rendant le parallèle avec ALICE AU PAYS DES MERVEILLES plus vrai encore.
Objectivement, le film est peut-être moins maîtrisé que le précédent, et le fait de jouer la carte du royaume en ruines donne une fausse impression de manque de budget pour créer de beaux décors, mais subjectivement, considérant mon attirance pour le cinéma d’horreur et l’animation de marionnettes, c’est mon Oz préféré.
OZ, THE GREAT AND POWERFUL (le monde fantastique d’Oz) de Sam Raimi – 2013
(Les titres français ne font pas grand-chose pour nous éviter de confondre les films)
Il y a deux façons d’aborder ce film : le voir comme un film familial Disney à tendance blockbuster, ou le voir comme un film de Sam Raimi.
Si on choisit la première option, le résultat est bon. J’ai quelques réserves sur lesquelles je reviendrais mais globalement le spectacle est réussi et le script assez bon. C’est davantage tous publics que RETURN TO OZ mais il n’y a aucune raison de le reprocher au film puisqu’il a été pensé ainsi.
Si on veut le voir comme un film de Sam Raimi par contre, on ne pourra que regretter que, à la manière d’un Tim Burton, il se mette à faire des films tous publics sans sa folie personnelle.
Mais pour ma part, puisque les précédents films et les histoires de Oz en général sont plutôt des contes pour enfants (l’exception, si on devait en trouver une, étant finalement RETURN TO OZ), je vais choisir la première option.
L’histoire est un préquel aux autres films qui nous raconte comment le magicien a débarqué dans ce monde magique qui porte son nom. Si vous connaissez l’histoire d’origine, vous savez que le magicien n’a de magicien que le nom. C’est un imposteur qui n’a aucun pouvoir. Il n’a donc pas créé ce monde fantastique. Le film nous propose donc le récit d’un magicien de foire tel que nous l’entendons, nous êtres humains, c’est-à-dire un simple illusionniste qui prépare ses tours, prénommé Oscar Diggs (surnommé Oz) qui va se retrouver pris dans une tornade mystique (comme Dorothy dans le premier film) et débarquer dans un monde féérique. On notera que tout le prologue est en noir et blanc, comme l’était l’introduction du film de Fleming.
Là-bas, Oscar sera accueilli par la bonne sorcière Théodora qui va voir en lui le messie que la prophétie a annoncé, un homme qui s’appelle Oz comme leur monde, et qui va libérer le royaume d’une méchante sorcière qui a empoissonné le roi. Evidemment, le magicien va jouer le jeu puisqu’on lui promet gloire et richesse (ce dont il a toujours rêvé.) Evanora, la sœur de Theodora, va donc demander l’aide du magicien pour terrasser la méchante sorcière. On comprend rapidement que ça va poser un problème puisque notre magicien est un imposteur, mais celui-ci va rencontrer Glinda, la soi-disant méchante sorcière qui en réalité ne l’est pas du tout (méchante.) Il nous sera révélé qu’en réalité une des autres sorcières se fait passer pour une bienfaitrice alors qu’elle est en réalité à l’origine des malheurs du royaume. Et le magicien, avec l’aide de Glinda à laquelle il va avouer n’avoir aucun pouvoir, va devoir mettre fin aux manigances de la vraie sorcière qui tire les ficelles.
Le film nous montrera la création de la méchante sorcière de l’Ouest (principale antagoniste de l’histoire originale) et rendra le personnage du magicien sympathique malgré ses mensonges en le faisant reconnaître ses torts, réfléchir sincèrement à une façon d’aider un peuple qui croit en lui, et finalement utiliser des méthodes scientifiques pour créer des dispositifs d’illusionnistes (inconnus dans ce royaume) pour créer une « magie scientifique » capable de faire peur et même faire des dégâts.
Je n’ai rien à reprocher au script du film. Il est bon. Les personnages évoluent, l’histoire est intelligemment construite, le final n’est pas un foutoir sans nom plein d’explosions comme souvent dans les films familiaux récents (même s’il y a de l’action, elle est pleinement justifiée et ingénieuse.)
Un conte de fées honorable
Le problème que j’aurais plutôt avec ce film c’est le casting. James Franco, Mila Kunis, Rachel Weisz. A priori de bons acteurs, non ? (euh…enfin…je ne suis pas très fan de James Franco mais bon…) Mila Kunis volait la vedette à Nathalie Portman dans BLACK SWAN, Rachel Weisz est une grande actrice que je trouve très douée, et James Franco est…euh…je ne le trouve pas mauvais mais il joue toujours le même personnage dans tous ses films. Le souci c’est que les acteurs ne semblent pas investis dans leur rôle, comme si ça ne leur convenait pas. Et je ne suis pas du genre à enfermer un acteur dans un type de rôle unique mais le fait est qu’on peut moins facilement croire à un méchant au visage tout mignon…sauf si l’acteur s’y met à fond. Et là…j’ai eu l’impression que comme c’était un film familial « pour enfants » qui ne sera jamais sélectionné aux Oscars, tout le monde s’en foutait un peu du rôle qu’il avait à jouer. Ils font le minimum syndical.
A côté de ça, les effets numériques ne sont pas toujours convainquant, mais puisque tout se déroule dans un monde féérique, cela ne choque pas tellement (de la même façon que le film Disney MALEFIQUE.) On perd cela dit un peu de magie du film de 1939 en troquant les maquettes et marionettes contre des CGI un peu trop lisses. Reste un bon film qui ne vous prendra pas pour un idiot, un bon divertissement adressé à tout le monde avec un script plus intelligent que la moyenne de ce genre de films. C’est déjà bien.
Quoiqu’il en soit, ce sera tout pour ce tour d’horizon des films sur l’univers d’Oz. Je ne peux que vous recommander ces films et vous inviter à vous méfier de ce que vous souhaitez !