
UN VISUEL POUR LES GOUVERNER TOUS
– TOLKIEN EN IMAGES : 2° PARTIE –
Dossier sur les principales adaptations de l’œuvre de J.R.R. Tolkien dans le monde des images
2° PARTIE : la bande-dessinée
Genre : Fantasy, Aventures.

Première édition en VF (et en petit format).
Cette série d’articles portera sur les principales adaptations réalisées à ce jour d’après l’œuvre de J.R.R. Tolkien dans le monde des images.
Depuis les illustrations que l’on trouve dans les livres, sur les couvertures, les calendriers ou les posters, jusqu’à la télévision et le cinéma, en passant par la bande-dessinée, ce sont des décennies d’adaptations qui, à travers les différents médiums, auront tenté de donner un visuel à la Terre du Milieu imaginée par l’écrivain dans sa jeunesse, développée ensuite jusqu’à sa mort en 1973, puis finalisée par son fils jusqu’à la mort de ce dernier en 2020.
Soyons clair : il ne s’agit absolument pas d’établir un catalogue exhaustif de tout ce qui a été fait, mais plutôt de relever un lien de cause à effet entre l’œuvre de l’écrivain et son évolution dans la culture populaire, dans le fond comme dans la forme.
Bien évidemment, la chose est tellement énorme, l’influence de la Terre du Milieu dans notre culture est désormais tellement organique, qu’un seul et modeste article ne fera qu’effleurer cette vaste étendue multimédia. On ira donc à l’essentiel, en essayant de ne relever que les adaptations officielles les plus connues.
Étant donné que ces adaptations sont de plus en plus nombreuses, notamment depuis le développemet des plateformes à la demande, l’article sera découpé en plusieurs parties, afin de pouvoir suivre une évolution en marche permanente…
Pour entamer la lecture de l’article dans les meilleures dispositions, vous pouvez aussi écouter, en même temps, un magnifique album de musique celtique…
Les comics
Étrangement, alors que le médium de la bande-dessinée se prêtait plus que les autres à ce type d’adaptation (le dessin en images fixes permettant des effets spéciaux illimités pour un budget quasiment nul en comparaison du cinéma !), il y a eu très peu d’auteurs de bande-dessinées qui se sont risqués à l’adaptation des récits de la Terre du Milieu.
Nul doute que l’idée d’adapter LE SEIGNEUR DES ANNEAUX a dû titiller plus d’un dessinateur ou scénariste (tiens, quand j’étais gamin et que voulais faire de la BD, je rêvais de le faire !). Mais tous, apparemment, se sont découragés avant même de se lancer dans une telle entreprise !
En réalité, une seule bande-dessinée, en l’occurrence un comic book (américain), s’est pleinement chargé de la mission : LE HOBBIT de Chuck Dixon (scénario) et David Wenzel (Illustrations), réalisé entre 1989 et 1990. Toutes les autres tentatives ont été prématurément avortées (dont une en France, juste avant la sortie du premier film de Peter Jackson, par Jérôme Lereculey, le dessinateur de la série LES 5 TERRES)….

David Wenzel : Un illustrateur faisant de la BD.
Il suffit de lire quelques pages de ce comic book pour comprendre ce qui a obligé tous les éventuels prétendant à rebrousser chemin su le terrain de l’art séquentiel : Tolkien était bavard ! Non pas au niveau des dialogues, mais au niveau de ses descriptions et de son sens du développement et du détail. Ce n’était pas Balzac, mais presque !
Nous verrons, dans le prochain article, que le médium du film d’animation permettra de multiplier les informations narratives en mélangeant les images, les dialogues, la voix-off et les chansons. Dixon & Wenzel ne disposent pas de la source sonore et optent pour une solution intermédiaire entre l’image et le texte. Chuck Dixon reprend ainsi les mots de Tolkien, dans les phylactères lorsqu’il s’agit de dialogues, et dans les cartouches de texte pour le reste. Il cesse de reprendre tout ce blabla à chaque fois que c’est possible, c’est-à-dire à chaque fois que les images de Wenzel viennent s’y substituer, évitant ainsi de décrire ce qui est montré par le dessin, tout en remaniant le texte originel lorsqu’il est trop long pour tenir dans une bulle ou dans un cartouche.
Cette solution offre un résultat fluctuant selon que certaines planches nécessitent plus ou moins de texte (deux exemples opposés dans les images ci-dessous), mais elle a le mérite de réaliser une adaptation extrêmement fidèle, presque exhaustive du roman.
Évidemment, la gigantesque Bataille des Cinq armées qui, chez Peter Jackson, occupera un film entier de près de trois heures, nécessite ici des coupes drastiques et une surabondance d’explications écrites, compressant le dernier quart du comic book en noyant le lecteur sous une avalanche de didascalies et des mises en page plus proches de l’illustration laborieuse que de l’art séquentiel.

D’une planche à l’autre : Les aléas de l’adaptation !
Certaines séquences sont en revanche fort bien restituées, comme celle dévolue aux aigles après la fuite des Monts brumeux. Dans les livres de Tolkien, on comprend bien pourquoi les aigles n’interviennent que très peu souvent : Ce sont des Maiar, tout comme Gandalf et les autres magiciens (ou comme les Balrogs), c’est-à-dire des esprits supérieurs (comparables à des anges dans la mythologie de la Terre du Milieu) qui ont choisi des formes d’animaux et qui n’éprouvent aucune amitié pour les autres créatures et surtout pas pour les humanoïdes. Mais ils apprécient beaucoup Gandalf, qui reste proche des animaux et qui a un jour guéri leur seigneur Gwaihir. Donc, notre magicien sait qu’il ne peut leur demander leur aide que très peu de fois, raison pour laquelle il ne le fait qu’en cas d’extrême nécessité !
Un détail appréciable qui fait défaut dès qu’il n’est pas exposé, faisant apparaître ces animaux (notamment dans les films de Peter Jackson), comme un bien pratique Deus Ex-machina, le néophyte ne comprenant pas qu’ils n’aident pas plus souvent les héros (ça aurait été pratique qu’ils emmènent directement Frodon au Mordor pour jeter l’Anneau unique dans le Mont Destin, par exemple !)…


Le bestiaire foisonnant de la Terre du Mileu…
Il s’agit en définitive d’une adaptation à la fois rigoureuse et académique, presqu’un modèle standard. Un exercice visant à sélectionner le texte qu’il s’agit de garder et de le compléter par les images à chaque fois que l’on peut éviter d’écrire ce que l’on voit.
Le résultat est plutôt réussi. Ce n’est pas toujours très fluide et pas toujours amusant à lire, certainement pas très original. Mais c’est très efficace et, pour peu que l’on aime l’univers de Tolkien, il s’agit d’une adaptation d’excellente qualité, dont le rapport entre le contenant (l’histoire de Bilbon le Hobbit) et le contenu (les dessins de David Wenzel), opère un plaisir manifeste, qui passe largement au-dessus de toutes les contraintes scénaristiques inféodées à un tel exercice. En gros : Si on aime vraiment l’univers de Tolkien, les qualités l’emportent sur les défauts, défauts que l’on réussit à surmonter pour apprécier le voyage en Terre du Milieu.

Smaug, le terrible…
Évidemment, les planches de David Wenzel, grand spécialiste de l’univers graphique médiéval, sont au diapason de cette transposition presque littérale réalisée depuis le premier livre de la Terre du Milieu : Plume délicate, aquarelles diffuses, imagerie universelle, tout concoure à faire de cette illustration séquentielle une parfaite adaptation de BILBON LE HOBBIT, dans son imagerie la plus classique…
À l’origine, le comic book avait été publié en trois numéros (3 comics issues) en 1989 et 1990. En VF, une première publication découpée en deux tomes, a vu le jour en petit format en 1991, chez feu la collection Comics USA de l’éditeur Glénat. Le tout est réédité quelques années plus tard en intégrale. Au moment de la sortie au cinéma du premier film de Peter Jackson, on le retrouve chez l’éditeur Vents d’Ouest, dans un coffret contenant deux tomes mais cette fois en grand-format, avec des couvertures réalisées par Eric Herenguel, un dessinateur français spécialiste de l’heroic fantasy !
C’est enfin Delcourt qui récupère le matériel et qui le publie dans une intégrale en bonne et due forme. Mais l’édition est aujourd’hui épuisée.
David Wenzel a ensuite réalisé un autre comic book d’heroic fantasy avec le scénariste Kurt Busiek : BAFFLEROG LE SORCIER, au style pictural très similaire…
Chuck Dixon est un excellent scénariste de comics, très solide, qui écrit toujours avec un style adulte. Il a longuement œuvré sur des séries populaires, notamment CONAN, BATMAN ou encore THE PUNISHER.

La publication originelle, en 3 comics issues.

Version Vents d’Ouest, avec un visuel sur les couvertures complètement différent du contenu !

Les versions intégrales de Comics USA, puis de Delcourt.
Je vous donne à présent rendez-vous dans la 3° partie de l’article, qui se focalisera sur les adaptations des récits de la Terre du Milieu dans le médium de l’animation.
See you soon !!!