LES PLUS GRANDS MONSTRES DE L’UNIVERS
– UNIVERSAL MONSTERS 3ème PARTIE –
Chronique des films de monstres du studio Universal
3ème partie : Les Crossovers !
Date de sortie des films : Années 40.
Genre : Fantastique, horreur, gothique.
1ère partie : L’histoire des Universal Monsters + les trois premiers films
2ème partie : LA MOMIE, L’HOMME INVISIBLE, les suites de FRANKENSTEIN et de DRACULA, LE LOUP-GAROU et LE FANTÔME DE L’OPÉRA
3ème partie – Vous êtes ici : Les crossovers !
4ème partie : Les Outsiders !
5ème partie : Les suites de LA MOMIE, de L’HOMME INVISIBLE, les Deux Nigauds et L’ÉTRANGE CRÉATURE DU LAC NOIR
Voici la troisième partie de notre article sur les films de monstres produits par le studio Universal dans les années 30 et 40. Plus communément nommés les Universal Monsters.
Après vous avoir chroniqué pas moins de douze films emblématiques de la série, je vous propose encore six films. La particularité étant que nous arrivons désormais sur les grands crossovers de l’époque, à travers lesquels se dessine peu à peu un véritable univers partagé, ce qui constitue une première dans l’histoire du multi-média. Un phénomène que l’on retrouvera bientôt dans les comics de super-héros !
La liste n’est pas exhaustive, mais elle ne fait pas l’impasse sur les films majeurs de l’époque.
Lon Chaney Jr. is… the monster !
LE SPECTRE DE FRANKENSTEIN (THE GHOST OF FRANKENSTEIN), par Erle C. Kenton (1941)
LE SPECTRE DE FRANKENSTEIN est la suite directe du FILS DE FRANKENSTEIN. Il est réalisé deux ans après ce dernier et l’intrigue reprend quasiment là où elle s’était arrêtée.
Ygor, l’estropié qui aidait jadis le baron Frankenstein à déterrer les cadavres, n’est pas mort ! Il avait pourtant succombé à plusieurs balles dans le film précédent…
La créature, la même qui fut jadis créée par le baron Frankenstein, n’est pas morte ! Elle avait pourtant été plongée dans un puits de soufre en fusion dans le film précédent…
Ygor part à la recherche de Ludwig Frankenstein, le second fils du Baron, afin qu’il redonne au Monstre sa force d’antan…
À bien des égards, les films de la collection Universal Monsters précèdent les comics de super-héros ! Le principe du crossover (on fait se croiser les personnages dans des films-chorales) et celui de la « résurrection » (on ressuscite un personnage mort pour le réutiliser dans une nouvelle histoire), soit deux éléments essentiels du monde de l’édition super-héroïque, sont déjà utilisés à plein régime par le studio spécialisé dans les films d’horreur !
À ce stade de la série des FRANKENSTEIN, force est de constater que les scénaristes ne se fatiguent plus à chercher des idées brillantes afin de ramener ces monstres à la vie :
– Le public : « M’enfin, comment Ygor a bien pu survivre à toutes ces balles et se porter comme un chef ? Comment a-t-il pu guérir tout seul dans le château abandonné des Frankenstein ?
– Les scénaristes : Il est vivant !
– Le public : Oui, d’accord, mais comment a-t-il fait pour survivre dans ces conditions ?
– Les scénaristes : Il est vivant mon petit Monsieur, c’est tout !
– Le public : Ah bon… Et, heu… le monstre, comment…
– Les scénaristes : Il est vivant !
– Le public : Oui mais…
– Les scénaristes : Il est vivant ! C’est tout ce qu’il y a à savoir mon petit Monsieur.
– Le public : Bon d’accord... »
It’s alive ! On vous l’a dit !!!
Ce quatrième film de la série des FRANKENSTEIN, alors qu’il n’est pas mauvais du tout, amorce le déclin des films d’horreurs de la Universal et l’arrivée de ce que l’on nommera bientôt les films de série B.
Le casting est prestigieux : Sir Cedric Hardwicke (Ludwig Frankenstein), Lionel Atwill (le Dr. Bohmer), Béla Lugosi (Ygor) et Lon Chaney Jr (le Monstre de Frankenstein !) se bousculent sous la caméra. Les décors et éclairages sont toujours aussi beaux, qui recyclent cette esthétique gothique somptueuse héritée de l’expressionnisme allemand
Seulement voilà, le réalisateur Erle C. Kenton n’arrive pas à la cheville de James Whale (le réalisateur des deux premiers -et meilleurs- films de la série), et le scénario, comme relevé plus haut, se contente de ramener sans cesse les monstres à la vie sans soucis d’élever le débat.
Attention : les crossover débarquent à partir du film suivant…
Le premier crossover de la planète geek !
FRANKENSTEIN RENCONTRE LE LOUP-GAROU (FRANKENSTEIN MEETS THE WOLF MAN), par Roy William Neil (1942) :
FRANKENSTEIN RENCONTRE LE LOUP-GAROU est la suite directe de deux films à la fois : LE LOUP-GAROU et LE SPECTRE DE FRANKENSTEIN, tous deux réalisés l’année précédente.
Larry Talbot, le loup-garou, est toujours vivant ! Dans sa quête pour lever la malédiction qui pèse sur lui, il va rechercher l’aide du Dr Frankenstein, ce dernier possédant le « secret de la vie et de la mort« . Malheureusement, le brillant docteur a trouvé la mort dans le film précédent, ce qui ne semble pas être le cas de sa monstrueuse créature…
Le film est réalisé par Roy William Neil, le réalisateur quasi-attitré de la série des SHERLOCK HOLMES avec Basil Rathbone. C’est à la fois le second film de la série des LOUP-GAROU et le cinquième de la série des FRANKENSTEIN. Il s’agit du premier long-métrage conçu pour que deux des grands monstres de la Universal se rencontrent (d’où le titre !), et donc du tout premier crossover !
Il y aura trois suites, dont une parodie, dans lesquelles viendra se joindre, en plus des deux monstres ici présent, le Comte Dracula !
Notez comme, au milieu de ce combat de titans, la belle de service sait rester digne et stoïque…
Depuis quelques années, la qualité des films de la série des Universal Monsters est en baisse. Les grands réalisateurs qui avaient mis en scène les premiers films (James Whale, Todd Browning) sont partis. Nous sommes passés, à présent, dans l’ère des séries B, des suites et des crossover. Le public commence à se lasser et le studio mise sur la surenchère en convoquant plusieurs figures à la fois parmi son bestiaire horrifique.
Pour autant, FRANKENSTEIN RENCONTRE LE LOUP-GAROU est une jolie réussite, qui bénéficie encore d’une réunion de fortes personnalités. Le réalisateur Roy William Neil est ainsi accompagné du producteur George Waggner et du brillant scénariste Curt Siodmack (respectivement le réalisateur et le scénariste du premier LOUP-GAROU), ainsi que d’un trio d’acteurs confirmés : Lon Chaney Jr réendosse le maquillage du Loup-garou pour la seconde fois (avant les trois films suivants !), Béla Lugosi incarne le Monstre de Frankenstein pour la première fois, tandis que Lionel Atwill joue encore un rôle différent alors qu’il était présent dans les deux FRANKENSTEIN précédents (l’inspecteur Krogh dans LE FILS DE FRANKENSTEIN et le Dr Bohmer dans LE SPECTRE DE FRANKENSTEIN) !
La plastique du film est absolument splendide. Toutes les scènes sont réalisées en studio, sous de superbes éclairages en clairs-obscurs et des décors gothiques, en carton-pâte certes, mais d’une beauté incontestable.
Le résultat est aujourd’hui très kitsch. Mais dans le contexte de ces films d’horreur des années 30 et 40 (et bien qu’ils ne fassent aujourd’hui plus peur à personne, entendu que la peur au cinéma est une notion qui ne résiste pas au temps qui passe), FRANKENSTEIN RENCONTRE LE LOUP-GAROU est un des incontournables de la série des Universal Monsters.
Une histoire de monstres…
La présence de Béla Lugosi sous les traits du Monstre est à la fois incongrue et très cohérente. Incongrue car il ne possédait pas la stature de Boris Karloff. Ce détail est très particulier car, comme nous l’avions dit dans la première partie de notre article, c’est Lugosi qui était pressenti pour interpréter le dit-monstre dans le premier film de la série des FRANKENSTEIN. Mais son incarnation tardive de la créature est ici tout à fait cohérente puisque, dans LE SPECTRE DE FRANKENSTEIN (le film précédent), le cerveau d’Ygor, interprété par Lugosi, avait été transplanté dans le crâne du Monstre. Il est donc tout à fait acceptable qu’il lui ressemble désormais davantage ! La prestation de l’acteur est d’ailleurs très impressionnante : Ce dernier compose un monstre désarticulé qui dégage une méchanceté hallucinante ! Et finalement, Lugosi se rattrape en proposant la meilleure incarnation du Monstre depuis le départ de Boris Karloff !
La fin du film voit nos deux monstrueuses créatures périr sous les eaux d’un barrage que l’on vient de faire exploser. Mais le public n’est pas dupe : Crossover et résurrection sont désormais deux notions qui, bien des années avant qu’elles ne deviennent l’apanage des comics de super-héros, réservent encore de beaux jours à nos monstres préférés…
Lon Chaney est sur tous les coups ! (mais fait-il vraiment peur ?)
LE FILS DE DRACULA (SON OF DRACULA), par Robert Siodmack (1943)
Le pitch : Un descendant du Comte Dracula, qui se fait appeler le comte Alucard, arrive en Louisiane afin d’épouser Katherine Caldwell, une riche héritière. Sitôt après son arrivée, les morts se multiplient au cœur de la plantation des Caldwell, ainsi que les chauves-souris…
LE FILS DE DRACULA est le troisième film de la série des DRACULA. Le rôle du « fils » est ici interprété par Lon Chaney Jr, le seul acteur ayant joué l’essentiel du bestiaire des Universal Monsters (Loup garou, Dracula, Monstre de Frankenstein et Momie !).
Nous sommes en 1943. A cette époque, le studio Universal n’a pas encore commencé à ressusciter ses monstres, hormis celui de Frankenstein, ce qui n’était pas trop incohérent étant donné sa nature de créature créée de toutes pièces. C’est pour cette raison que le Comte Dracula, interprété par Béla Lugosi, était resté mort depuis 1931, et que c’est vers ses descendants que les scénaristes se sont tournés pour exploiter le filon horrifique.
Cependant, dès l’année suivante, la tentation de la résurrection l’emportera et le véritable Dracula, cette fois incarné par John Carradine, fera son retour d’outre-tombe…
Brumes, cercueil, moustaches et chauves-souris…
LE FILS DE DRACULA possède un certain nombre de défauts. Le film est assez bavard, comme c’était souvent le cas à l’époque, avec les films de la série. Il est parfois même assez ampoulé. Les effets spéciaux sont très réussis hormis les plans de la chauve-souris, proprement ridicules. Mais surtout, c’est le choix de confier le rôle titre à Lon Chaney Jr qui semble le plus incongru, tant l’acteur n’incarne en rien le côté slave et morbide de la figure iconique du comte des Carpates, telle que l’avait inauguré Béla Lugosi. Chaney Jr lança pourtant la mode du « vampire à moustaches« , puisque l’acteur suivant, John Carradine, arborera une très belle moustache de cowboy !
Les défauts sont néanmoins contrebalancés par un grand nombre de qualités : Comme dit ci-dessus, hormis les chauves-souris factices, les effets spéciaux sont formidables, notamment lorsque le comte Alucard se transforme en brume vaporeuse ! Les décors sont soignés et l’atmosphère du Bayou de Louisiane, filmé dans un noir et blanc expressionniste dans la plus pure tradition du studio, offre contre toute attente un cadre gothique à souhait. La réalisation de Robert Siodmack est elle-même très soignée, et le script de son frère Curt est assez habile, qui ouvre sur une fin superbe et poignante. Les thèmes propres à la mythologie du vampire, comme la vie éternelle, l’amour et la mort, ne sont pas oubliés mais au contraire développés de manière remarquable, « pour l’époque », évidemment…
A l’arrivée, le film s’impose tout de même comme une référence dans la série des Universal monsters.
Moult monstres !
LA MAISON DE FRANKENSTEIN (HOUSE OF FRANKENSTEIN), par Erle C. Kenton (1944)
Suite directe de FRANKENSTEIN RENCONTRE LE LOUP-GAROU, LA MAISON DE FRANKENSTEIN est le second crossover des Universal monsters. C’est à la fois le sixième film de la série des FRANKENSTEIN et le troisième de la série des LOUP-GAROU. Il marque également le retour du personnage de Dracula, absent depuis 1931.
C’est désormais la formule adaptée : Plus il y a de monstres qui se bousculent au générique, plus il y a de monde dans les salles de cinéma ! Le studio Universal joue la surenchère et envoie ses trois monstres principaux hurler dans le même film. Ajoutez-leur la figure du savant fou et celle de son assistant estropié, et vous n’avez pas moins de cinq figures majeures du bestiaire horrifique réunies dans un seul film !
Tous à la chorale !
D’un côté, le film est très agréable à regarder. Sa courte durée (67 mn seulement) lui confère un rythme impeccable, les décors gothiques et expressionnistes, fidèles à la grande tradition du studio, sont toujours aussi somptueux. Les acteurs sont extras. Boris Karloff rejoint la série des FRANKENSTEIN pour la quatrième fois, mais n’incarne plus le monstre. Il est désormais le savant fou ! Lon Chaney Jr interprète le loup-garou Larry Talbot pour la troisième fois (sur cinq !). John Carradine fait son entrée dans le rôle de Dracula, qu’il reprendra dans le film suivant. Glenn Strange inaugure également sa prestation sous les traits du Monstre de Frankenstein, qu’il reprendra dans les deux films suivants. Et Lionel Atwill joue dans la série un nouveau personnage pour la quatrième fois consécutive (après avoir été l’inspecteur Krogh, le Dr Bohmer et le maire du village) !
Mais d’un autre point de vue, la déception s’impose. Les monstres font un peu de la figuration (surtout Dracula !). Et puis surtout, le scénario est abracadabrantesque ! Après toute cette multitude de films sur le thème du monstre, du vampire et du loup-garou, on commence à se lasser très sérieusement de cette même histoire qui revient en boucle, dans laquelle un savant complètement fou n’en finit plus d’être obsédé par le cerveau du Monstre de Frankenstein, où le loup-garou se transforme toutes les cinq minutes parce que c’est toujours la pleine-lune, où un forain ambulant se promène tout le temps avec le cercueil du Comte Dracula, à qui il suffit de retirer le pieu du squelette pour qu’il se recompose en neuf seconde… Au bout d’un moment, le manque d’inspiration des scénaristes et l’absence de renouvellement des thèmes horrifiques commence à devenir vraiment lassant.
Un crossover ? Un event ? C’est la maison des idées !!!
LA MAISON DE DRACULA (HOUSE OF DRACULA), par Erle C. Kenton (1945)
Suite directe de LA MAISON DE FRANKENSTEIN, voici le troisième crossover des Universal monsters, le septième film de la série des FRANKENSTEIN, le quatrième de la série des LOUP-GAROU et le troisième de la série des DRACULA (si l’on excepte la fille et le fils, bien sûr) !
Le pitch : Le Comte Dracula, qui était mort brulé par le soleil et transformé en squelette dans le film précédent, se porte de nouveau comme un chef (sans explication aucune !). Le loup-garou, qui avait succombé sous une rafale de balles d’argent dans le même film précédent, est également en pleine forme (sans plus d’explications…). Quant au Monstre de Frankenstein, englouti sous une maison en flammes (dans le même film précédent), il est toujours aussi alité…
Dracula et Laurence Talbot (le Loup-garou), par un heureux concours de circonstances, se retrouvent chez le Dr Edelmann, un savant bien de sa personne. Tous-deux le supplient de les délivrer de leurs malédictions respectives grâce à sa science infuse. Pour y parvenir, ils doivent retrouver le journal du Baron Frankenstein, perdu sous les ruines de la maison qui a brulé dans le film précédent… Et qui trouvent-ils sous les décombres ? Le Monstre de Frankenstein bien sûr !
À partir de là, Dracula va échanger son sang avec le Dr Edelmann, qui deviendra fou et n’aura plus qu’une idée fixe : Redonner au Monstre de Frankenstein sa force d’antan, délaissant ainsi le Loup-garou qui va se transformer puisque, bien évidemment, c’est la pleine lune ! Mais les villageois du coin ne l’entendent pas de cette oreille et leur vindicte viendra à bout de tous ces monstres, jusqu’au film suivant !
Des acteurs qui se croient chez eux (surtout Dracula d’ailleurs…) !
Le casting de LA MAISON DE DRACULA réunit Lon Chaney Jr dans le rôle du loup-garou (pour la quatrième fois sur cinq !), Glenn Strange dans le rôle du Monstre de Frankenstein (pour la seconde fois sur trois !), et John Carradine dans le rôle de Dracula (pour la seconde et dernière fois). Ce dernier, avec sa moustache et son accent américain, ressemble davantage à un guitariste de country-music qu’à un comte des Carpates, et je m’interroge sur le fait qu’il demeure l’un des acteurs ayant interprété Dracula parmi les préférés d’un grand nombre de fans !
À noter, encore, la présence de Lionel Atwill, qui interprète le rôle d’un personnage différent sur chaque film de la série depuis LE FILS DE FRANKENSTEIN…
Le déclin des films estampillés Universal Monsters, amorcé depuis quelques années, arrive à son terme. LA MAISON DE DRACULA est le moins réussi de la série. Tout d’abord à cause de son scénario abracadabrantesque, qui recycle le contenu des autres films sans vergogne et sans la moindre cohérence réaliste, laissant le spectateur rêveur devant cette accumulation de situations grotesques. Ensuite parce que, plastiquement, il est également moins soigné que les autres, alors que l’esthétique des films d’horreur de la Universal demeurait jusqu’ici sa principale qualité. Même s’il y a encore de beaux restes, on est loin de la splendeur des grands classiques des années passées. Et enfin, le réalisateur Erle C. Kenton se montre également peu inspiré, qui emballe une série de scènes bavardes en restant avare dès qu’il s’agit de nous montrer les monstres du générique, ce qui est quand même paradoxal étant donné le sujet et la promesse d’en voir un maximum si l’on se base sur le principe du crossover !
La fin des Universal Monsters approche, mais ils nous réservent leur baroud d’honneur pour la confrontation finale dans un dernier film… rigolo !
Qu’est ce qu’on se marre ici !!!
DEUX NIGAUDS CONTRE FRANKENSTEIN (ABBOTT & COSTELLO MEET FRANKENSTEIN), par Charles Barton (1948) :
Le pitch : Chick et Wilbur travaillent en Floride pour une compagnie de chemin de fer. Ils transportent bagages et autres objets volumineux. Un beau jour, ils doivent amener dans le Musée des Horreurs deux caisses contenant les véritables dépouilles du Comte Dracula et du Monstre de Frankenstein, que les gaffes de Wilbur ne tardent pas à réveiller…
De toute manière, c’était un coup monté ! Dracula à une idée fixe : Il veut offrir au Monstre de Frankenstein un nouveau cerveau. Mais il ne nous explique pas pourquoi, ce qui est franchement dommage tant il est évident que c’était l’idée du siècle ! Tel un savant complètement fou, il pense que le cerveau de Wilbur ferait parfaitement l’affaire, bien aidé par son assistante qui l’attendait dans son château sur son île lugubre. À noter que la dite assistante est une savante folle, et qu’elle a hérité du journal du Baron Frankenstein, ce qui, pour le coup, est rudement pratique pour cette histoire de transplantation de cerveau !
Mais Dracula et sa clique n’avaient pas prévu une chose : Larry Talbot, le Loup-garou, lui aussi de retour, ne l’entend pas de cette oreille (de loup), et entend bien (de l’autre) mettre fin à tous ces sombres projets. Là encore, nous aurions bien aimé qu’il nous explique pourquoi il fait lui aussi une fixation sur le cerveau de Frankenstein, au lieu de s’occuper de sa propre malédiction…
Pendant ce temps là, Wilbur tente de prévenir Chick de cette catastrophe, mais ce dernier ne remarque rien ! Ainsi, poussés par leur compagnie d’assurance qui les somme de retrouver les corps perdus des deux monstres destinés au Musée des Horreurs, les deux nigauds n’ont d’autre choix que de se rendre dans le lugubre château, en compagnie du Loup-garou qui se transforme toutes les cinq minutes car, depuis le début du film, c’est tout le temps la pleine lune…
Etes-vous prêt pour le combat final réunissant tout ce beau monde ?
Ce coup-ci, c’est vraiment la foire aux monstres !
DEUX NIGAUDS CONTRE FRANKENSTEIN sonne le glas de l’âge d’or des films d’horreur de la Universal, mettant un terme à la série des Universal Monsters. Le principe du crossover, qui consistait à mêler le bestiaire du studio, était évidemment motivé par un succès décroissant que l’on cherchait à combler grâce à l’affiche la plus généreuse possible en monstres mythiques. Mais les films devenaient de moins en moins bons, car confiés à de médiocres réalisateurs et scénaristes.
De son côté, le duo Abbott & Costello (une sorte de Laurel & Hardy au rabais) commençait à s’essouffler après une belle série de succès. DEUX NIGAUDS CONTRE FRANKENSTEIN sera donc un moyen de relancer les deux nigauds en beauté, tout en achevant le parcours des monstres-maison, qui disparaîtront ainsi définitivement.
L’idée pouvait paraître saugrenue : Mélanger les grandes figures de l’horreur avec les comiques troupiers de la Universal. Mais il faut avouer que la sauce fonctionne immédiatement. L’ensemble est plutôt bien troussé, les pitreries lourdingues des comiques se mêlant aux superbes décors gothiques dont le studio avait fait sa spécialité.
Le cynisme du projet est ainsi largement contrebalancé par deux éléments : Le premier est que l’on ne se moque pas des moyens mis en place. Le scénario a beau, dans le fond, relever du n’importe quoi, il n’en est pas moins juteux dans la forme. Les monstres sont bien là, et errent dans tous les coins pour notre plus grand plaisir régressif !
Niveau esthétique, par contre, on ne se fout pas de notre gueule !
Le casting est scrupuleux : Lon Chaney Jr interprète le loup-garou Larry Talbot pour la cinquième (et dernière) fois, Glenn Strange réendosse le maquillage du Monstre de Frankenstein pour la troisième fois consécutive et, surtout, Bela Lugosi nous revient en Dracula, pour la seconde fois après plus de dix-sept ans, et également pour la dernière (alors que tout le monde est persuadé qu’il a interprété le rôle un nombre incalculable de fois !). Les effets spéciaux sont superbes, tout en s’accommodant du ton amusé de l’ensemble du métrage. Les transformations du Comte Dracula en chauve-souris sont effectuées sous la forme de dessins animés (réalisés par Walter Lang, le créateur de Woody Woodpecker !!!), et c’est un régal ! La structure de l’ensemble est donc d’une solidité remarquable.
Le second élément qui vient jouer en faveur de la chose est sa manière d’en rire. Le générique nous met tout de suite dans l’ambiance, avec un dessin-animé ouvertement parodique. Le fait d’être dans une comédie est parfaitement assumé. Et l’humour a beau être aussi léger qu’un char d’assaut, on s’amuse énormément tant c’est bien rythmé et bien emballé.
Une parodie pour dire adieu aux Universal Monsters…
C’est ainsi que naissait les parodies de films d’horreur et que le public prenait goût à l’humour noir. Et comme l’avaient fait les grands classiques de la décennie précédente, DEUX NIGAUDS CONTRE FRANKENSTEIN allait s’imposer comme une œuvre séminalee incontournable. Dans son giron, une multitude de franchises verront le jour, que ce soit dans le domaine des comics (FROM THE CRYPT, WARREN PUBLISHING) ou des séries animées (SCOOBY DOO, LE CROQUE-MONSTRES SHOW), jusqu’à certaines œuvres de nos époques, comme le MONSTRES & Cie des studios Pixar.
Les Universal Monsters, cest presque fini. Après avoir vécu dans un véritable univers partagé, ces grandes figures de la littérature fantastique terminent ainsi leur règne sur l’âge d’or hollywoodien dans une parodie. On les retrouvera à la fin des années 50 en Angleterre, sous les projecteurs du studio Hammer Films, dans des versions modernes en couleur, tout aussi somptueuses, dominés par des acteurs non moins emblématiques.
Après DEUX NIGAUDS CONTRE FRANKENSTEIN, Abbott & Costello repartiront auréolés d’un nouveau succès, et étireront la sauce pendant encore dix ans, rencontrant successivement la Momie, l’Homme invisible et même Le Dr Jekyll & Mr Hyde (avec Boris Karloff dans le rôle-titre !), les enterrant tous au passage…
Pourtant, à ce moment là, un tout dernier monstre n’est toujours pas encore apparu du fond de son lac noir…
Je vous donne à présent rendez-vous dans la quatrième partie de notre article pour vous parler encore de films de monstres… ou pas !
1ère partie : L’histoire des Universal Monsters + les trois premiers films
2ème partie : LA MOMIE, L’HOMME INVISIBLE, les suites de FRANKENSTEIN et de DRACULA, LE LOUP-GAROU et LE FANTÔME DE L’OPÉRA
3ème partie – Vous êtes ici : Les crossovers !
4ème partie : Les Outsiders !
5ème partie : Les suites de LA MOMIE, de L’HOMME INVISIBLE, les Deux Nigauds et L’ÉTRANGE CRÉATURE DU LAC NOIR
See you soon !!!