
* HOMME ET LOUP, JOUR ET NUIT présente *
– HURLEMENTS, par JOE DANTE –
Chronique du film HURLEMENTS (THE HOWLING)
Rubrique HOMME ET LOUP, JOUR ET NUIT
Date de sortie du film : 1981
Durée : 91 minutes
Genre : Fantastique, horreur.
Réalisateur : Joe Dante

Cet article est inscrit dans le cycle dédié aux films de loup-garous que nous appelons HOMME ET LOUP, JOUR ET NUIT. Soit un sous-genre à part entière du cinéma fantastique et horrifique qui contient en son sein un panel assez conséquent de films importants.
Nous reviendrons de temps en temps vous présenter d’autres films de la rubrique. Mais chaque chose en son temps. Aujourd’hui, nous retournons en 1981 afin de remettre, sous la lumière de la pleine lune, une histoire de colonie de vacances pour adultes remplie de bestioles poilues…
Pour entamer la lecture de l’article dans les meilleures dispositions, quoi de mieux que d’écouter la BO de Pino Donaggio en même temps…
Le pitch : Karen White (Dee Wallace) est la célèbre journaliste d’une chaîne télévisée de Los Angeles. Puisqu’un tueur en série nommé Eddie fantasme sur elle, elle accepte d’aider la police en attirant le psychopathe dans un quartier sordide de la ville. Eddie est abattu par les policiers et Karen sort de cette expérience littéralement traumatisée.
Un éminent thérapeute, le docteur George Waggner (Patrick Macnee), lui propose alors de rejoindre ce qu’il nomme “la Colonie”, un centre de repos pour adultes isolé à la campagne.
Terry, une autre journaliste chargée de mener l’enquête sur la mort d’Eddie, découvre que le corps de ce dernier a disparu de la morgue ! Il ne va pas tarder à réapparaître à la colonie, bien vivant. Car il s’agit en réalité d’un loup-garou…
Vintage.
Il convient de le reconnaître : HURLEMENTS (THE HOWLING en VO) a pris un sérieux coup de vieux. En général, ce qui vieillit prématurément dans le cinéma fantastique, ce sont les effets spéciaux et, surtout, les effets horrifiques. Paradoxalement, dans le cas de HURLEMENTS, c’est plutôt l’inverse ! Tandis que ses effets spéciaux, révolutionnaires pour l’époque, restent encore assez impressionnants, on a désormais un jeu d’acteur daté, une mise en scène très lente, bavarde et théâtrale. Le scénario est confus et s’embourbe parfois dans des expositions surannées (émancipation féminine et mœurs libérales caricaturales…).
Pourtant, il est toujours possible d’adorer le film ! Une fois digéré le poids des ans, l’ensemble possède un charme fou, et l’on est surpris de sursauter devant une poignée de scènes positivement sanglantes. Car le genre cinématographique des lycanthropes s’était cantonné jusque-là à du folklore relativement inoffensif, hérité de l’âge d’or des studios Universal et des heures de gloire de la Hammer. Avec HURLEMENTS et le début des années 80, on rendait soudain le loup-garou beaucoup plus dangereux, sanglant et mortellement gore !

C’est la révolution chez les lycanthropes !!!
Le film est l’œuvre de Joe Dante, lequel ne s’était fait remarquer jusque-là qu’avec son PIRANHA en 1978. On sait néanmoins qu’il sait filmer ! Certaines scènes de HURLEMENTS s’imposent instantanément comme de somptueuses toiles gothiques, notamment toutes les scènes de nuit. Deux séquences, en particulier, demeurent marquantes :
On a tout d’abord la longue séquence d’introduction à Los Angeles, où Karen fait connaissance avec l’affreux Eddie, qu’on ne devine que dans la pénombre d’une ville lugubre et oppressante, dont l’illustration sinistre tranche avec son habituelle représentation exotique de cité balnéaire branchée. Disons, en tout cas, que si l’on a déjà vu un Los Angeles glauque au cinéma, on l’a rarement vu aussi gothique !
On a ensuite cette scène phénoménale pour l’époque, d’une poésie noire étincelante, dans laquelle deux protagonistes font sauvagement l’amour en pleine forêt, tout en se transformant en loups sous le clair de lune (Rrrrrrh ! essayez donc de résister au magnétisme et à l’attrait sensuel de la trop rare et trop vite disparue Elisabeth Brooks !!!)…

Rrrrrrrh… Elizabeth Brooks…
Le volet des effets spéciaux et des maquillages s’impose comme l’un des éléments-clés de la réussite du film. C’est d’abord Rick Baker qui le supervise. On connait aujourd’hui l’importance du bonhomme qui, des loup-garous aux singes (de ce côté, on lui doit le KING KONG de 1976, GORILLES DANS LA BRUME, GREYSTOKE – LA LÉGENDE DE TARZAN ou encore LA PLANÈTE DES SINGES version Tim Burton), va s’imposer au fil des ans comme l’un des plus grands spécialistes des effets spéciaux et des maquillages de l’histoire du cinéma. Il quitte néanmoins le tournage du film assez vite pour rejoindre celui du LOUP-GAROU DE LONDRES du concurrent John Landis, non sans avoir confié la tâche de le remplacer à son poulain Rob Bottin, promis lui aussi à une belle carrière (il réalisera les magnifiques effets spéciaux du THE THING de John Carpenter et du LEGEND de Ridley Scott, par exemple).
Transformation !
La scène de transformation principale tient encore la route et demeure bien craspec, avec moult dégoulinements d’hémoglobine. En revanche, l’aspect un peu grotesque et rigolo des loups-garous (des acteurs en costume, dont l’influence au niveau du look aura néanmoins perduré jusqu’aux plus récents UNDERWORLD) dissone avec divers effets gores du plus bel effet !
Le film possède un style fortement ancré dans les années 70 (d’où sa représentation d’un Los Angeles à l’aspect urbain aqueux et putride). Il est moins maîtrisé que LE LOUP-GAROU DE LONDRES, réalisé en parallèle (et qui coûta dix fois plus cher, il faut tout de même le préciser !). Mais d’un autre côté, il assume pleinement son statut de série-B et étale généreusement ses références. Et le cinéphile averti de repérer tout du long les clins d’œil adressés à l’Histoire du cinéma, version “loup-garou” ! Ainsi, de nombreux personnages de HURLEMENTS portent le nom du réalisateur d’un film avec la présence d’un loup-garou dedans : Stuart Walker (LE MONSTRE DE LONDRES, 1935), George Waggner (LE LOUP-GAROU, 1941), Roy William Neill (FRANKENSTEIN RENCONTRE LE LOUP-GAROU, 1943), Terence Fisher (LA NUIT DU LOUP-GAROU, 1961), Freddie Francis (LE TRAIN DES ÉPOUVANTES, 1965), Erle C. Kenton (LA MAISON DE FRANKENSTEIN, 1944 et LA MAISON DE DRACULA, 1945), Charles Barton (DEUX NIGAUDS CONTRE FRANKENSTEIN, 1948). Un véritable florilège pour l’amateur de lycanthropie sur pellicule !

Coucou les grandes oreilles !
Le film aligne aussi une belle galerie de “gueules” que l’on a appris à reconnaitre dans notre culture populaire et notre cinéma bis. Autour de l’héroïne, interprétée par Dee Wallace (qui jouera la maman du petit Elliot dans E.T. L’EXTRATERRESTRE l’année suivante), se démarquent ainsi Dick Miller, présent dans tous les films de Joe Dante (son rôle du bibliothécaire, dans le film, étant son préféré !) ; Kevin McCarthy, également présent dans plusieurs films de Joe Dante et qui avait été le héros du film L’INVASION DES PROFANATEURS DE SÉPULTURES en 1966 ; Robert Picardo qui joue ici Eddie et que l’on reverra dans un paquet de films fantastiques comme EXPLORERS, GREMLINS 2, L’AVENTURE INTÉRIEURE et SMALL SOLDIERS (également signés Joe Dante), LEGEND, FLIC OU ZOMBIE, TOTAL RECALL et moult séries TV ; Slim Pickens, vétéran habitué à jouer les seconds rôle dans des dizaines de westerns emblématiques (ici en habit de flic façon cowboy !) ; Keneth Tobey, un vieux de la vieille qu’on avait vu dans LA CHOSE D’UN AUTRE MONDE en 1951 ou dans les deux premiers films de Ray Harryhausen : LE MONSTRE DES TEMPS PERDUS en 1953 et LE MONSTRE VIENT DE LA MER en 1955 (ici en uniforme de policier classique) ! Et enfin John Carradine, qui interprétait Dracula à la suite de Bela Lugosi dans les Universal Monsters (et que l’on voit, pour la toute première fois, affublé de longues dents pointues) !
C’est ainsi toute une cinéphilie, bien entendu, que nous déroule Joe Dante avec une volonté de dessiner un univers cinématographique particulier, constellé de figures connotées, comme un jeu de piste.

Les “gueules” de la série B hollywoodienne !
Après tout ce temps, HURLEMENTS demeure l’une des pierres angulaires de la figure lycanthropique dans le domaine du 7° art. Il faut le regarder avec les yeux du cinéphile amateur de vieux films fantastiques, de ceux qui deviennent ce que l’on appelle… les “grands classiques” !
WOLFEN avait, le premier, ouvert la voie d’une période riche en films de lycanthropes. Un sous-genre qui verra plusieurs de ses chefs d’œuvre éclore entre 1981 et 1984.
La seule année 1981 nous offre trois films emblématiques de la lycanthropie, avec WOLFEN, LE LOUP-GAROU DE LONDRES et HURLEMENTS. Et la série s’achève en beauté en 1984 avec LA COMPAGNIE DES LOUPS (et perdure même quelques années avec d’autres films mineurs, comme par exemple PEUR BLEUE, d’après Stephen King en 1985, entrecoupé par le segment introductif du clip THRILLER, de Michael Jackson !).
En revanche, le succès de HURLEMENT (17 985 000 $ au box-office pour un budget de 1 000 000 $, rien qu’aux USA !) déclenchera toute une série de suites jusqu’en 2011 (sept suites !), toutes complètement nulles !
Pour le coup, notre rubrique HOMME ET LOUP, JOUR ET NUIT vous donne rendez-vous pour éclairer d’autres films du genre, tout en évitant scrupuleusement les suites de HURLEMENTS, qui ne méritent certainement pas un article (ou alors faudra vraiment insister)…

Heu… oui mais non…
See you soon !!!
