HAMMER FILM : 2ème PARTIE
– LES VAMPIRES –
Chronique des films du studio Hammer – 2ère partie : Les VAMPIRES / partie 1
Date de sortie de films : de 1958 à 1970.
Genre : Fantastique, horreur, gothique.
1ère partie : Les films FRANKENSTEIN
2ème partie : Les films de Vampires 1 – Vous êtes ici
3ème partie : Les films de Vampires 2
4ème partie : Les autres films d’horreur 1
5ème partie : Les autres films d’horreur 2
6ème partie : Les autres films d’horreur 3
Christopher Lee : Dracula forever !
Cette 2ème partie portera sur tous les films de vampires produits par le studio Hammer entre 1958 et 1970.
Nous allons explorer les sept premiers films dans l’ordre chronologique :
1. Le Cauchemar de Dracula -1958
2. Les Maitresses de Dracula – 1960
3. Le Baiser du Vampire – 1963
4. Dracula, Prince des Ténèbres – 1966
5. Dracula et les femmes – 1968
6. Une Messe pour Dracula – 1969
7. Les Cicatrices de Dracula – 1970
Sur les seize films qui composent cette série, huit sont consacrés au personnage de Dracula, parmi lesquels sept sont interprétés par Christopher Lee. Celui-ci réussira l’exploit de détrôner Béla Lugosi dans l’inconscient collectif en devenant à son tour l’incarnation universelle du personnage créé par Bram Stocker (qu’il interprétera encore dans d’autres film ailleurs que chez la Hammer).
Trois autres films (seulement deux en VO) arborent fièrement un titre avec Dracula dedans, sans que le personnage n’apparaisse. Et un seul d’entre eux est une suite de la série éponyme.
Enfin, trois films parmi les seize forment une trilogie autour d’une autre grande figure de la littérature vampirique : Carmilla.
Le Saigneur des vampires !
1) LE CAUCHEMAR DE DRACULA (HORROR OF DRACULA) – 1958
Le pitch : Jonathan Harker arrive en Transylvanie dans le château de Dracula, car ce dernier requiert ses services en tant que bibliothécaire. Mais en secret, Harker est venu, missionné par le professeur Van Helsing, afin de chasser le prince des vampires qui fait régner la terreur dans le pays. Hélas, Jonathan est mordu par une disciple du Comte. C’est alors à Van Helsing de reprendre la traque du monstre, lequel, après avoir contemplé une photographie de la fiancée de Jonathan, est venu jusque chez elle pour la kidnapper (et la vampiriser par la même occasion)…
Après avoir réinterprété le mythe de Frankenstein avec FRANKENSTEIN S’EST ÉCHAPPÉ ! en 1957, le studio britannique Hammer Films s’intéresse un an plus tard à une autre icone du patrimoine de l’horreur : Dracula.
LE CAUCHEMAR DE DRACULA est une adaptation laconique du roman de Bram Stocker, en ce sens qu’elle fonctionne à la manière d’une version courte, qui fait l’impasse sur moult éléments du livre pour n’en conserver que l’essentiel. Malins, les responsables du studio contournent ainsi leur manque de moyens en évitant les scènes les plus coûteuses. L’action ne se déroule donc plus à Londres mais autour de la Transylvanie (sans qu’on ne soit obligé de mettre en scène le voyage du Demetter !), et de nombreux personnages sont oubliés.
Pour autant, le scénario respecte les grandes lignes du roman et en préserve l’esprit, à défaut d’en préserver la lettre.
Une première apparition, dans l’ombre…
Cette deuxième production Hammer en matière de films d’horreur reprend l’essentiel du casting et de l’équipe technique du film précédent. On retrouve ainsi Peter Cushing et Christopher Lee (rejoints par l’excellent Michael Gough), interprétant respectivement le rôle du professeur Van Helsing et de Dracula. Le réalisateur Terence Fisher, le scénariste Jimmy Sangster, le chef opérateur Jack Asher et le compositeur James Bernard rempilent également, prouvant qu’ils sont en train de créer une véritable continuité thématique et esthétique, à travers lesquelles se développe une imagerie gothique somptueuse, aux couleurs flamboyantes, pétrie de passionnantes métaphores sur le code moral et les tabous de la société victorienne…
C’est ainsi que le personnage de Dracula, qui apparaît sous les traits de Christopher Lee comme une créature à la présence iconique incomparable, à la fois bestiale et majestueuse, triste et cruelle, va incarner plus que jamais l’attrait de l’interdit libertinage, faisant écho à la dimension psychanalytique du roman de Bram Stocker, dans laquelle se disputaient les figures symboliques d’Eros & Thanatos. Dans LE CAUCHEMAR DE DRACULA, c’est un séducteur vénéneux qui entre la nuit dans le lit des femmes qui l’attendent avec ardeur, et qui mentent à leurs époux pour préserver leurs plaisirs interdits !
Contrairement à la précédente incarnation du mythe, interprétée par Béla Lugosi , le Dracula version Christopher Lee séduit de manière directe, le désir suintant sous un regard de braise ! Ce dernier, capable de passer de l’aristocrate suave et courtois à la bête sauvage et assoiffée de sang, demeure toujours très impressionnant !
Les somptueux tableaux gothiques de la Hammer (le même château, dans tous les films, mais filmé différemment)…
Terence Fisher et son équipe excellaient réellement sur le terrain de la métaphore. Dissimulé sous les traits d’un être à l’apparence plus ou moins normale, le vampire incarne ainsi le riche aristocrate soumettant le pauvre en son pouvoir. Il polarise l’attrait des plaisirs défendus par le code pénal, sans aucune note de romantisme à l’eau de rose. Les films d’horreur de la Hammer, par le biais de leurs belles images, révélaient alors les tréfonds de l’âme humaine sous le vernis d’une flamboyante séduction.
Le film a bien entendu vieilli et ne distille plus beaucoup son effroi de jadis. Mais il faut se remettre dans le contexte de l’époque pour imaginer la réaction de ces spectateurs qui découvraient pour la première fois l’horreur en couleur et le sang vermeil qui dégoulinait des crocs de Dracula avec une effrayante modernité. À noter, enfin, que le script limite les apparitions du « monstre » à quelques scènes savamment distillées, accentuant encore le pouvoir de fascination du plus grand séducteur des ténèbres…
Hé ! C’est même pas Dracula hé !
2) LES MAÎTRESSES DE DRACULA (THE BRIDES OF DRACULA) – 1960
Le pitch : Une jeune institutrice arrive dans une région reculée de la Transylvanie (comme de bien entendu…) afin de travailler dans un pensionnat pour jeunes filles. Abandonnée par son côcher dès son arrivée dans le bled du coin, elle le tient pas compte des avertissements des villageois et accepte l’invitation de la baronne Meinster dans son château à l’arrivée de la nuit. Grave erreur ! car le fils de la baronne, emprisonné par cette dernière, alors qu’il supplie la jeune femme de le délivrer, n’est pas le jeune innocent qu’il prétend être…
Avec LES MAÎTRESSES DE DRACULA, Terence Fisher nous offre une superbe suite, qui voit non pas le retour de Dracula (mort dans le film précédent), mais celui du Dr Van Helsing (toujours interprété par Peter Cushing), venu affronter l’un des disciples du terrible comte : Le baron Meinster…
Comme la plus-part des grandes réussites de la Hammer, ce second film de vampires vaut surtout pour sa première moitié : Les scènes d’expositions sont splendides, l’atmosphère est envoûtante à souhait, le suspense est total, les acteurs ont des « gueules » inouïes et la galerie des clichés (collines brumeuses, château gothique, carrosse lugubre, auberge rustique, gousses d’ail et reliques diverses, musique angoissante) relèvent du travail d’orfèvre…
…Jusqu’à l’apparition du monstre.
Dès lors, le suspense n’a plus tellement lieu d’être et les péripéties se succèdent mollement jusqu’à un dénouement final manichéen en diable.
Tout est dans le titre !
Mais ne soyons pas trop hâtifs à juger la chose : Avec le recul, LES MAÎTRESSES DE DRACULA s’impose comme l’un des tous meilleurs films de la série et ses nombreuses qualités emportent notre adhésion, si tant-est que l’on goûte encore à ce genre de oldies horrifiques de carton-pâte.
Certaines scènes, notamment dans la première moitié du film, donc, sont de toute beauté et les images gothiques somptueuses éclaboussent nos rétines de leurs couleurs chamarrées, où le bleu et le lilas participent de l’envoûtement. D’autant que derrière ce vernis de circonstance, on sent bien que les auteurs du film développent cet attrait pour les plaisirs interdits qui se cachent derrière la métaphore de ces goules damnées par leur choix de vie impies…
Nous retiendrons finalement deux choses de cette grande période du cinéma fantastique horrifique :
– Ses défauts : Rien n’est plus angoissant que ce que l’on imagine sans le voir. Hélas, on finit toujours par les voir, ces canines et ces chauves-souris en plastique !
– Ses qualités : Une imagerie magistrale, une toile de fond exceptionnelle et une galerie d’acteurs inoubliables (l’hallucinante Freda Jackson et ses effroyables éclats de rire !).
La famille à dents !
3) LE BAISER DU VAMPIRE (KISS OF THE VAMPIRE) – 1963
Le pitch : Un couple de jeunes mariés tombe en panne de voiture dans un bled reculé d’une région perdue de la vieille Europe (la Transylvannie, quoi…). Ils trouvent refuge dans une vieille auberge où ils comprennent vite qu’ils sont les seuls clients. Dès le premier soir, ils reçoivent une invitation du Comte Ravna, qui habite le chateau du coin et qui les invite derechef pour le lendemain à l’occasion de leur bal masqué annuel. Le lendemain du bal, Gérald, le jeune marié, se réveille seul à son hôtel, où tout le monde lui assure qu’il a toujours été seul et que personne n’a jamais vu sa femme…
Le bal des vampires !
Après Dracula et ses disciples, la Hammer s’intéresse à toute une famille de vampires avec LE BAISER DU VAMPIRE ! Ou l’histoire d’un jeune couple parti en voyage de noce et accueilli dans un château hébergeant en réalité toute une horde de suceurs de sang camouflés sous les oripeaux d’une vieille famille aristocratique ! Et c’est lors d’un bal organisé en leur honneur que tout va basculer dans l’horreur…
Réalisé par Don Sharp, un second couteau de la maison Hammer s’étant souvent illustré dans l’ombre de Terence Fisher, LE BAISER DU VAMPIRE, bien qu’il se passe des services des acteurs phares du studio anglais (Christopher Lee & Peter Cushing en tête), est un classique.
Comme d’habitude, les images en technicolor sont flamboyantes à souhait et les décors sont superbes (même s’ils sont recyclés à partir des films précédents !).
Comment résister à l’attrait du vampire…
Mais peut-être plus encore que dans les autres films de la Hammer, cette imagerie magistrale dissimule une succulente métaphore vénéneuse sur les même désirs interdits. Car si le vampire aristo illustre le pouvoir du riche sur les pauvres, il est également l’incarnation éclatante du fantasme libertin ! Et l’on retrouve ce refus du romantisme à l’eau de rose propre au studio, toute amourette tournant très mal (pauvre petit couple parti innocemment en voyage de noce !)…
Malheureusement, le temps a fait son office et le film a aujourd’hui sombré dans le kitsch. Jetez un coup d’œil à l’affiche, et vous aurez l’impression qu’il s’agit d’une comédie ! Cet humour involontaire éveillait déjà à l’époque l’intérêt de quelques visionnaires qui s’empressèrent de se moquer gentiment de ces oripeaux gothiques ! Parmi eux, un certain Roman Polanski s’emparera de notre BAISER DU VAMPIRE et réalisera, quatre ans plus tard, un somptueux BAL DES VAMPIRES en forme de parodie directement adressée au film de Don Sharp et à ses émules…
Ça va saigner !
4) DRACULA, PRINCE DES TÉNÈBRES (DRACULA, PRINCE OF DARKNESS) – 1966
Le pitch : Deux couples d’amis voyagent ensemble au fin-fond de la Transylvanie (comme par hasard…). N’écoutant que leur témérité, ils vont s’empresser de demander gite et couvert dans le château du coin, sans faire fi des autochtones, qui semblent en avoir une peur bleue.
Ils sont acueillis par le serviteur du Comte Dracula. Ce dernier est mort dans le premier film de la série. Mais son serviteur n’entend pas se contenter d’une telle formalité…
La vérité est aujourd’hui surprenante : Dracula n’apparait pas dans les deux films précédents parce que l’acteur Christopher Lee refusait d’endosser à nouveau le rôle, de peur de se voir enfermé dans cette image. Non seulement Lee est par la suite revenu sur sa décision à maintes reprises (dix fois en tout, dont quatre pour d’autres productions !), mais son nom a fini par rester plus ou moins indissociable du prince des ténèbres pour le reste de sa carrière. Soit une nouvelle icône cinématographique propre à incarner les méchants, voire le mal absolu…
Une scène de résurrection qui en impose.
Ainsi, Dracula ressuscite dans DRACULA, PRINCE DES TÉNÈBRES, le troisième film de la série.
Si Christopher Lee accepte de reprendre les canines, c’est à cause des insistances répétées de ses producteurs. Il en est à chaque fois navré, car les scénaristes ont jugé bon d’en faire une menace complètement muette (l’acteur ne prononce ici pas un seul mot !). Ce parti-pris déçoit beaucoup notre homme, qui estime ne pas être mis en valeur en tant qu’acteur au sens propre du terme (à quoi ça sert de bosser dur si on n’utilise pas son talent ?).
Pour l’essentiel, même si elle est clairement en dessous du CAUCHEMAR DE DRACULA, cette suite est un excellent cru.
Comme à son habitude, Terence Fisher excelle à distiller une ambiance démente dans toute la première partie du film, lorsque la menace demeure hors-champ. Le long métrage est d’ailleurs clairement divisé en deux parties distinctes, la résurrection du vampire se jouant au moment de la transition entre les deux.
On a vu que c’est une constante avec les films de la Hammer : Ils sont moins réussis dès lors que l’élément fantastique fait littéralement son entrée. Fisher semble d’ailleurs se désintéresser de son film au fil de la seconde partie, enfilant les séquences à la va comme je te pousse. C’est dommage car le script insère à ce moment-là des éléments puisés dans le roman de Bram Stocker qu’on n’avait pas vus dans le premier film, comme la présence de Reinfield, interprété avec une truculence hallucinante par Thorley Walters.
Pas besoin de prononcer un seul mot quand on est Prince des Ténèbres !
L’essentiel se joue donc dans la première partie, alors que deux couples de la bonne société britannique sont venus s’encanailler dans nos bonnes vieilles collines de la Transylvanie. Les gens du coin ont beau les prévenir d’éviter le vieux château comme la peste, ils s’y précipitent néanmoins. Et ça tombe pile-poil pour le serviteur dévoué qui attendait sagement l’occasion de ressusciter son maitre grâce à un peu de sang frais…
La tension monte ainsi dans un crescendo sans faille jusqu’à l’apparition tant redoutée du tenant du titre, le bien-nommé Prince des Ténèbres en personne. La scène de résurrection est la plus réussie de toute la série, avec une touche de gore particulièrement savoureuse (je me comprends).
Pour le reste, le film bénéficie de l’esthétique somptueuse de la Hammer, dont les images en technicolor magnifient ces décors gothiques de la vieille Europe, leurs forêts automnales, leurs villages bavarois aux tavernes enfumées et leurs châteaux perchés sur les pics enneigés de la région des Carpates…
1, 2, 3, résurrection !
05) DRACULA ET LES FEMMES (DRACULA HAS RISEN FROM THE GRAVE) – 1968
Le pitch : Une année est passée depuis la mort de Dracula, mais le village qui jouxte la région du château des Carpates reste encore traumatisé par le règne de terreur du Seigneur des Ténèbres.
L’évêque venu visiter le village constate que les paroissiens vivent reclus et ne vont plus à l’église. Il décide alors d’aller exorciser le château de Dracula et impose au prêtre de la région de le suivre. Celui-ci, pleutre comme Scoubidou (mais nettement moins rigolo), terrifié à l’idée de rencontrer un vampire, décide d’abandonner l’évêque en cours de route et commet la bourde du siècle : Comme il est extrêmement maladroit, notre bon curé glisse sur le verglas, heurte un rocher et vient tomber littéralement nez à nez avec le comte des Carpates qui git emprisonné dans un torrent glacé, en parfaite conservation depuis la fin du film précédent ! Et puisque le hasard fait bien les choses, la chute du bonhomme ayant brisé la glace, c’est le cas de le dire, son sang coule pile-poil sur les babines du vampire, qui ressuscite aussitôt ! Ni une ni deux, Dracula soumet le prêtre-Scoubidou à son emprise et en fait son nouveau serviteur. L’heure est venue pour le Seigneur des Ténèbres d’aller re-semer la terreur dans le village du coin…
Ça a de la gueule, quand-même…
DRACULA ET LES FEMMES, réalisé par Freddie Francis, est la suite directe du précédent.
C’est devenu un véritable gimmick : Etant donné que Dracula meurt à la fin de chaque film, il faut trouver une idée pour le ressusciter !
Si la séquence de résurrection du film précédent était plutôt impressionnante, celle qui ouvre celui-ci est carrément ridicule et annonce l’aspect feuilletonnesque et monotone qui est en train de s’emparer de la série. En gros, ça va se gâter, le studio s’empressant d’aligner des films à la qualité très discutable et décroissante, pour une franchise qui perdra peu à peu toute sa valeur, faute de ne savoir en renouveler le concept.
Voici donc le premier film de la série dont le script n’a aucun intérêt, puisque l’on se contente de répéter, à peu de choses près, les histoires précédentes, tout en les vidant de leur substance puisque l’on n’en garde que la surface. Et c’est d’ailleurs la première fois que l’on termine sur un happy end, chaque film de la Hammer s’étant appliqué, jusqu’ici, à réduire à néant les moindres amourettes…
On l’a vu : Son truc à Dracula, c’est les femmes ! Il n’hésite d’ailleurs pas à les mettre sous cloche…
Mais l’intérêt du film est ailleurs. Car même si Freddie Francis n’arrive pas à la cheville de Terence Fisher, il emballe le tout avec une plastique somptueuse qui assure à elle-seule le spectacle. Il faut dire que Francis est un des plus grands chefs opérateurs de l’Histoire du cinéma (on lui doit la photographie du sublime LES INNOCENTS et de plusieurs films de David Lynch, dont ELEPHANT MAN). Il nous offre ainsi l’occasion de contempler de magnifiques séquences, dont une série de scènes nocturnes sur les toits de la ville dans une ambiance à mi-chemin de Charles Dickens, Bram Stocker et les frères Grimm.
Nous sommes donc ici dans un film à la très belle mise en forme, dont l’intérêt se joue avant tout sur une atmosphère à la saveur incomparable, soulignée par une série de tableaux illustrant à merveille le folklore de cette Europe centrale, gothique en diable.
La réalisation est purement visuelle et le sous-texte des films précédents s’est peu à peu évaporé, mais l’ensemble, malgré ses naïvetés et ses incohérences, est fort bien troussé, porté par un bon développement des personnages principaux, tous campés par des acteurs très attachants (dont la splendide Veronica Carlson et cette crapule de Michael Ripper, deux habitués des films de la Hammer que l’on retrouve quasiment dans un film sur deux au cours de cette deuxième moitié des années 60 !).
Venez donc tester le sang de Dracula !
6) UNE MESSE POUR DRACULA (TASTE THE BLOOD OF DRACULA) – 1969
Le pitch : On le devine déjà : Au lieu de raconter une histoire différente sur le même thème, cet énième script va s’évertuer à ce qu’il y ait une suite logique au film précédent.
Puisqu’il faut à chaque fois ressusciter le Prince des ténèbres, les scénaristes doivent faire preuve d’une certaine imagination afin de trouver une idée valable à chaque fois ! Ici, c’est grâce à un vendeur de bazar ayant dans sa boutique un échantillon du sang de Dracula en poudre (gasp, quel pitch !) que le monstre va être ramené à la vie ! Une cérémonie aura donc lieu dans une église désaffectée, à l’occasion de laquelle un aristocrate voulant s’encanailler en éprouvant de nouvelles sensations (ce pitch, mes aïeux !!!) va boire le fameux sang dilué dans le sien…
Mais bon, après l’avoir fait renaître, il faut encore le re-tuer ! Et là, le scénariste John Elder va faire très fort : À la fin du film, Dracula va enfin s’apercevoir qu’il squatte une église depuis le début (me demandez pas pourquoi il ne s’en était pas aperçu jusque-là, je n’en sait fichtre rien !) et, ainsi, comme il a peu d’atomes crochus avec les signes religieux (au cas où vous ne le sauriez pas), il va tout simplement mourir. Voilà, « FIN », circulez, y a plus rien à voir…
C’est le drame ! Dracula vient de s’apercevoir qu’il vit dans une église !
Christopher Lee, qui n’a pas l’habitude d’être loquace dans le rôle de sa vie, va néanmoins prononcer ici quelques mots qui, il convient de l’avouer, seront au centre de tout le suspense du film. Voyez par vous-même : Trois des profanateurs qui l’ont ramené à la vie ayant pris la fuite, Dracula va mettre un point d’honneur à les détruire (effectivement, ils n’ont pas été très gentils de le ressusciter…). Ainsi, après avoir tué le premier de ces sinistres personnages, le vampire va lâcher un laconique « The first ! ». Après avoir tué le second, il déclamera avec détermination : « the second ! ». Quant au troisième, le suspense arrive à son paroxysme lorsque le spectateur se pose la question fatidique : va-t-il dire : « the third ! » ou « the last ! » ? Insoutenable…
Réalisé par Peter Sasdy, le film en lui-même ne manque pas de qualités formelles et, pour tout dire, est plutôt bien troussé au niveau de la mise en scène et de l’écriture proprement dite. Mais les tenants et aboutissants du scénario versent vraiment dans le n’importe quoi dès qu’il s’agit de traiter du vampirisme, assénant un coup supplémentaire sur la tête d’une franchise qui commence à boire la tasse…
Le spectateur, à ce stade, face à ce qui devient clairement une routine feuilletonnesque, s’amuse davantage qu’il ne tremble. Et, ma foi, ce n’est déjà pas si mal !
À droite : Ressortie du film en 1979 et grosse frayeur pour le petit enfant que j’étais, qui avait vu l’affiche au cinéma !
7) LES CICATRICES DE DRACULA (SCARS OF DRACULA) – 1970
Le pitch : Mort depuis le film précédent (comme d’habitude), le Comte Dracula est soudain ressuscité par une chauve-souris qui passait dans le coin… Tandis que les villageois décident enfin de venir mettre le feu au château du seigneur des vampires, ils découvrent à leur retour que toutes les femmes restées au village ont été massacrées par une armée de chauve-souris aux ordres du Comte !
Le règne de la terreur a bel et bien recommencé…
Entrez dans le château de Dracula…
LES CICATRICES DE DRACULA franchit un palier supplémentaire dans la routine en terme de mort et de résurrection puisqu’ici, Dracula n’a tout simplement plus besoin de personne pour ressusciter ni pour mourir, il se débrouille tout seul !
Ce cinquième film s’ouvre ainsi avec son retour (une chauve-souris bave un peu de sang sur son linceul et hop ! résurrection !) et s’achève avec sa nouvelle mort, alors qu’il vient de brandir une barre de fer en plein orage (pratique pour se faire électrocuter direct du haut de son château !).
Ajoutez à cela une tripotée de chiroptères en plastique qui font « hik-hik » et vous obtenez un cocktail kitsch de haute volée. Et pourtant… Il s’agit d’un des meilleurs films de la série !
Le réalisateur Roy Ward Baker, l’un des plus doués du studio Hammer avec Terence Fisher et John Gilling, joue à merveille sur la symbolique des couleurs (notamment le rouge) et rend à la figure du vampire ses lettres de noblesse grâce à une mise en scène pleine de sens, s’offrant même le luxe de reprendre des éléments du roman de Bram Stocker.
Une idée est notamment superbe : Un paquet encore emballé tombe sur un tapis dont la décoration évoque une marre de sang. La scène suivante nous en dévoile le contenu : Il s’agit du portrait de la jeune femme que convoitera bientôt Dracula, dont le verre a été brisé dans la chute, annonçant ainsi les événements…
À présent, Dracula décide lui-même de QUAND il ressuscite…
LES CICATRICES DE DRACULA se démarque ainsi des autres grâce à une imagerie particulièrement somptueuse et une mise en scène de haut niveau, comme un sursaut au moment où le navire prend l’eau. À noter, enfin, un zest d’érotisme qui annonce le tournant des années 70 et un Christopher Lee plus loquace qu’à l’accoutumée.
Le film est par ailleurs le dernier de la série à proposer cette esthétique très marquée par les décors gothiques et les couleurs saturées, et c’est la dernière fois que le compositeur James Bernard en signe la partition. C’est la dernière fois aussi que l’action se déroule au 19° siècle. À partir du prochain, les scénaristes vont nous l’amener dans les années 70…
… Et de QUAND il meurt !
Je vous retrouve bientôt pour la suite de notre article avec neuf autres films saignants !
1ère partie : Les films FRANKENSTEIN
2ème partie : Les films de Vampires 1 – Vous êtes ici
3ème partie : Les films de Vampires 2
4ème partie : Les autres films d’horreur 1
5ème partie : Les autres films d’horreur 2
6ème partie : Les autres films d’horreur 3
See you soon !!!
C’est marrant, c’es vrai qu’en lisant comme ça, LES CICATRICES a l’air couillon. Mais le film est très cool. A la limite qu’il ressuscite tout seul on s’en fout, surtout si on n’a pas spécialement vu tous les précédents à la suite comme un feuilleton et qu’on ne prend pas ça pour la 10ème résurrection^^ C’est un vampire, créature des enfers tout ça machin, il revient si il veut…au moins on ne perd pas 30min à trouver une excuse nulle.
Mais les chauve souris toutes moches en plastique et le final avec la barre de fer…c’est un peu dommage. Surtout que sa mort est spectaculaire. Mais ç’aurait été mieux qu’on lui plante le truc dans le corps et qu’il se mange un éclair ensuite plutôt que brandir lui-même un paratonnerre. L’est bête lui !
Mais un des plus beaux visuellement en tous cas oui. Je le préfère au premier (LE CAUCHEMAR), que je trouve un peu mal rythmé.
LE CAUCHEMAR, ça fait un moment que je l’ai vu mais je me souviens m’être dit « quoi ? c’est déjà le duel final ? Mais il s’est rien passé » Je me suis pas ennuyé au moins mais le film est peut être un peu lent à démarrer et la fin arrive vite.
Le premier est un classique d’un autre temps aujourd’hui. Très, très lent. Mais j’adore son atmosphère.
J’ai ajouté le pitch à chaque film par rapport à l’ancienne version de l’article. Je me suis bien amusé avec les gimmicks ! ^^