
POT POURRI DE MYTHOLOGIES
Chronique de la série : THORGAL
1 : LE CYCLE DE LA REINE DES MER GELÉES
Date de publication : 1977 – 1980.
Auteurs : Jean Van-Hamme (scénario), Grzegorz Rosinski (dessin).
Genre : Heroic fantasy, médiéval fantastique, aventures.
Éditeur : Le Lombard.

À l’origine, c’était dans le journal de Tintin…
Cet article portera sur les deux premiers albums de la série THORGAL originelle. C’est le premier d’une suite explorant la saga par cycles. On y trouve cependant aussi les albums autonomes, puisque chaque tome est un élément constitutif de l’ensemble de la destinée du héros qui, tel Superman, est venu des étoiles…
LA MAGICIENNE TRAHIE et L’ÎLE DES MERS GELÉES sont les deux premiers tomes de la série. Ils forment une histoire complète et constituent le premier cycle de la saga que l’on nommera postérieurement LE CYCLE DE LA REINE DES MER GELÉES.
Les deux albums ont été édités initialement en 1980, bien que la série ait commencé à être publiée dans Le Journal de Tintin à partir de 1977.
Le scénario est de Jean Van-Hamme, et les dessins sont l’œuvre de Grzegorz Rosinski.

Les débuts de Grzegorz Rosinski.
Le pitch : Autour de l’an Mille, au royaume des vikings du nord, le jeune Thorgal est enchaîné et livré à la marée montante par Gandalf-le-Fou, roi des vikings, qui n’accepte pas que sa fille soit amoureuse du jeune homme.
Thorgal est sauvé par une mystérieuse étrangère, qui lui fait jurer de la servir une année durant. Pendant cette période, il devra l’aider à se venger de Gandalf-le-Fou, qui l’a apparemment torturée par le passé.
Cette aventure mènera notre héros à la découverte des ses mystérieuses origines. Effectivement, Thorgal a été recueilli dans un radeau lorsqu’il était enfant par les vikings et, depuis tout ce temps, nul ne sait d’où il vient…
Relire ces premières aventures aujourd’hui, trente ans après leur sortie initiale, débouche sur le constat qu’elles ont énormément vieilli, mais en même temps que l’ensemble était déjà, dès le début, d’une très grande qualité.
Certes, il est évident qu’au niveau du scénario, Jean Van-Hamme tâtonnait un peu et qu’il ne savait pas forcément où il voulait aller dès le premier épisode. On peut ainsi percevoir quelques fautes de continuité entre les deux premiers albums dans le sens où l’auteur relie l’ensemble avec deux ou trois pirouettes scénaristiques un peu tirées par les cheveux (et il continuera à pratiquer l’acte de rétro-continuité avec les récits publiés dans l’album L’ENFANT DES ÉTOILES). Toutefois, arrivé au terme du second tome, l’essentiel de la mythologie qui formera le fil conducteur de la série est déjà en place et, bien qu’elle évoluera constamment par la suite, cette mythologie restera fidèle aux révélations de ce premier cycle. Il aura donc fallu deux albums seulement pour que Van-Hamme dresse la toile de fond de toute la saga !

Quand alliance rime avec vengeance…
Au niveau du dessin c’est un peu la même chose : Si les premières planches accusent le poids de l’âge et souffrent de quelques défauts de jeunesse, Rosinski corrige très vite le tir et, dès le deuxième tome, maitrise son art de manière extrêmement mature. Pour lui aussi, les choses évolueront constamment (plus tard, il cessera d’encrer ses planches et choisira la technique de la peinture directe), mais l’aspect caractéristique de son style pictural et de ses personnages restera fidèle à leur première version, rendue définitive au terme de ce premier cycle.
Mélange de mythes médiévaux, d’Heroic-fantasy et de science-fiction, la mythologie selon THORGAL nait d’une savante alchimie entre ces trois constituants romanesques, le tout mâtiné d’une touche de réminiscences religieuses. Si, au départ, l’influence de J.R.R. Tolkien se fait ressentir (le roi des vikings s’appelle Gandalf et Thorgal ressemble comme deux gouttes d’eau à Aragorn du SEIGNEUR DES ANNEAUX), la série s’émancipe et trouve rapidement ses marques. À l’arrivée, cet équilibre entre l’histoire bien réelle, les mythes scandinaves, la métaphore biblique, la science-fiction et la fantasy, finit par conférer à l’ensemble une étonnante proximité pour le lecteur, qui avance au gré de ces aventures comme si tous ces éléments coulaient de source.
Sur le terrain des références, on peut également penser à CONAN LE BARBARE, tant le destin houleux des deux personnages comporte de points communs. Mais ce n’est qu’un point supplémentaire à accorder à Jean Van-Hamme dans son entreprise de digérer les influences majeures du genre consacré.

De l’Heroic très Fantasy !
Dans ce premier cycle de la saga, le lecteur peut d’ors et déjà mettre un pied dans un certain nombre d’éléments directement issus de quelques mythes bien connus, comme l’Atlantide et l’Hyperborée (mais oui, comme dans les aventures de Conan le Barbare et sa mythologie de l’Âge Hyboréen !), ici fusionnés pour ne former plus qu’un. Sur le terrain de ce brassage des mythes, Van-Hamme se révèle d’entrée de jeu très habile et nous offre en définitive une véritable relecture mythologique de notre monde, depuis sa réalité jusqu’à toutes ses extrapolations romanesques et fantastiques. On perçoit dès lors pourquoi la série a connu d’emblée un tel succès et comment elle a pu durer aussi longtemps, bien que la qualité de ses récits va connaitre le déclin après le CYCLE DU PAYS QÂ. Mais, nous n’en sommes pas encore là…

Un peu d’Hyperborée et un soupçon d’Atlantide pour un mélange entre la fantasy et la science-fiction…
En définitive, THORGAL, c’est la confluence des histoires d’aventures, des principales mythologies, des grandes références littéraires liées à la fantasy et à la science-fiction, le tout dilué dans un univers qui lui est propre, transcendé par un graphisme somptueux et une magnifique écriture réalisés par deux auteurs parmi les meilleurs dans leur domaine. À posteriori, l’une des réussites majeures de l’histoire du 9° art !
Vous devrez donc commencer par ces deux premiers albums qui, s’ils ne sont pas encore les meilleurs, dressent bel et bien toute la toile de fond de la série. Ce premier cycle est entrecoupé par un épisode postérieur publié à l’origine dans le magazine Tintin. Le temps de cet intermède, Van-Hamme & Rosinski nous emmènent dans une aventure où notre héros tombe dans une crevasse et découvre un paradis (habité par deux sublimes jeunes femmes seules et leur petite sœur !) dont il ne peut apparemment s’échapper. Il réussira finalement à s’en sortir mais apprendra que sa mésaventure lui a coûté un an de sa vie puisque, dans ce paradis virtuel, le temps s’écoule plus lentement que dans le monde réel. Ce dernier thème, à travers lequel le héros se voit priver d’une ou plusieurs années de son existence, reviendra plusieurs fois dans la suite de la série…

PRESQUE LE PARADIS : Un superbe épisode de transition au milieu du 1° cycle.
See you soon !!!